Paupérisme n Les rues de la capitale sont de plus en plus peuplées de sans-abri. Hommes, femmes, vieux, jeunes et moins jeunes, ils sont issus de toutes les régions du pays. Boulevard Amirouche, place du 1er Mai, place Audin, rue Didouche-Mourad, square Port-Saïd, place des Martyrs… Ce sont là, entre autres, les endroits que choisissent des centaines de sans-abri pour passer la nuit. Chaque hiver, c'est le même décor à travers les différentes artères de la capitale. Toute la journée, ils sillonnent les rues d'Alger à la recherche d'un travail et la nuit, ils se réfugient sous les arcades, dans les cages d'escaliers, aux abords des mosquées ou des différentes institutions de l'Etat. Par une nuit glaciale de ce mois de février, nous sommes allés à leur rencontre. 20h 30. Place du 1er -Mai, le mercure affiche 3°C. Un groupe de sans-abri, trois femmes et deux hommes, a déjà pris place devant la Cnas, en face du siège du ministère de la Jeunesse et des Sports. Assis sur des cartons d'emballage ou à même le sol, certains, les plus «chanceux», disposent de couvertures pour se réchauffer. Les autres se contentent de se protéger contre le froid glacial, avec… un carton d'emballage. «Ils s'installent à cette place, car c'est plus calme. Ici la sécurité est garantie. C'est pour cela qu'ils sont nombreux à y passer la nuit», témoigne un habitant du quartier. 21h 10. Notre deuxième destination est le boulevard Amirouche. Les mêmes images, même plus choquantes, s'offrent à nous. Un carton d'emballage, une couverture, un bout d'étoffe ou une bâche pour se protéger contre le froid, forment, pour cette frange de notre société, un lit de fortune… Hommes, femmes et enfants, ils sont plus d'une dizaine à y passer la nuit chaque soir. Parmi eux, certains ont trouvé refuge devant le siège de la Banque extérieure d'Algérie (BEA), en face du commissariat central, d'autres devant le siège du ministère de l'Agriculture et du Développement rural. D'autres encore à côté de la Banque de l'agriculture et du développement rural (Badr) ou même devant le siège de la bourse d'Alger. A notre arrivée sur les lieux, certains étaient déjà endormis. Un peu plus loin, devant les portes de la Grande-Poste, nous avons également trouvé une dizaine de personnes endormies sans couverture sous «des tentes» faites de cartons d'emballage. Un homme d'un âge avancé est enveloppé dans une petite couverture, les pieds exposés au froid glacial. A côté de lui, un jeune dort à même le sol, sans couverture. 22h 15. Nous poursuivons notre tournée nocturne. A la rue Larbi-Ben-Mhidi, plusieurs personnes dorment à même le sol, sur les trottoirs. Assis sur un carton, un père de famille jouait aux dominos avec ses deux enfants, attendant qu'un passant lui glisse un peu d'argent… A la rue de la Lyre, la place des Martyrs, le square Port-Saïd, le même décor s'offre à nos yeux. Ces sans-abri passent leur nuit dans des conditions désastreuses et connues de tous. Une véritable question s'impose : qu'est-ce qui pousse des centaines de personnes à passer la nuit dehors ?