Voilà donc l'oncle et le neveu sur la route. Ils procèdent par étapes, s'arrêtant dans les villes pour se restaurer et se reposer. C'est ainsi qu'ils passent dans la Mitidja où un savant en sciences religieuses, leur donne l'hospitalité. Ce savant, Abû Zakaria, met sa demeure à leur disposition et, les deux hommes, épuisés, y passent quelques jours. Ils bénéficient aussi de la sollicitude des frères Sanhadj. Un soir, alors qu'il dormait chez son hôte, Abdelmoumène fait un rêve qui va l'impressionner. Il se voit au milieu d'une foule, tenant sur ses genoux un grand plat de nourriture : chacune des personnes présentes passe devant lui et mange du plat. A son réveil, le jeune homme raconte à son oncle son rêve. «Ne le raconte à personne, dit l'oncle, de peur que l'on te fasse du mal.» D'ailleurs, l'oncle, soupçonneux, ne veut plus rester dans le village. Le jour même, il décide de repartir. Ils font un long chemin avant de s'arrêter dans la tribu des Aït Zaldawin, dans la Kabylie orientale. La nuit même, Abdelmoumène fait un autre rêve. Il se voit de nouveau nourrissant une foule, mais cette fois-ci il porte le plat sur la tête. «Que signifient donc ce rêve et le précédent, mon oncle ?, demande le jeune homme — Dieu Seul le sait, mon fils, dit l'oncle, mais nous ne devons pas nous attarder ici !»