Résumé de la 2e partie En juillet 1954, Antoni, 20 ans, redevient civil. Un matin, fatigué d?être sans travail, il embarque clandestinement sur le «Jaroslaw-Dabrowski». Antoni jette un coup d??il de derrière sa bâche. Il a juste le temps de voir arriver l?énorme masse, au-dessus de lui, et de rentrer la tête dans les épaules ! Un ballot, puis dix, dégringolent autour et au-dessus de lui? Antoni est assommé, à moitié étouffé, il cherche vainement à faire glisser les colis pesants, il s?épuise en vain. Ses jambes sont bientôt immobilisées, sa tête coincée, il tente d?un seul bras, resté libre, de s?agripper à un filin, trop tard. La deuxième grue déverse son chargement, Antoni lâche sa prise et disparaît complètement. Il n?a pas poussé un cri. A sept heures du matin, la cale est bourrée. Les lourdes portes métalliques se referment. Le cargo est prêt à appareiller. Personne ne s?est aperçu de la présence à bord d?un candidat à la liberté. Dix tonnes de fibre de bois le recouvrent. Normalement, le cargo aurait dû appareiller le 22 juillet 1954 de Gdynia en Pologne pour Londres, et y arriver le 26 : quatre jours de voyage. Mais à peine le chargement terminé, des ennuis mécaniques retardent le départ. Une journée, une nuit, une autre journée, une autre nuit s?écoulent. L?équipage en profite pour déserter le navire pendant que les mécaniciens s?affairent. Dans la cale, c?est le silence. Enfin, à l?aube du 24, le «Jaroslaw Dabrowski» largue ses amarres et met le cap sur l?Angleterre. Le voyage se passe sans incident notoire. Le 28 juillet, dans l?après-midi, il aborde la Tamise, se range à quai et la douane britannique donne l?autorisation de déchargement. Aussitôt les dockers se mettent au travail. L?un d?eux, Palmer, un mastodonte à l?accent cockney, est chargé de guider l?arrimage des colis à fond de cale. Il n?en reste plus que quelques-uns. Soudain, il se met à jurer. Son pied a dérapé sur quelque chose, et on lui tient la jambe. Une main maigre a saisi son pantalon et s?y agrippe avec la force du désespoir? Une main jaillie on ne sait d?où, une main toute seule? Glacée, crochue, qui ne veut plus le lâcher. Antoni est vivant. Pendant six jours, enfoui sous des tonnes de fibre de bois, il n?a respiré que par miracle. Sans pouvoir bouger ni la tête ni le corps. La poitrine écrasée, les membres paralysés. Dans le noir, sans manger, sans boire, grelottant de froid et de fièvre. Une loque vivante certes, mais une loque polonaise que l?on dépose sur le pont d?un cargo polonais ! Il semble bien que l?aventure s?arrête là pour Antoni, à quelques mètres de la liberté, le mercredi 28 juillet 1954. Soigné, restauré, il se retrouve à nouveau prisonnier. Mais dans la cabine du capitaine, cette fois. Le jeudi, un officier britannique du service d?immigration, alerté par les dockers, vient lui rendre visite. Antoni ne parle pas anglais et c?est le capitaine polonais qui sert d?interprète. C?est un dialogue de sourds, que l?on peut résumer ainsi : Antoni : «Je demande l?asile politique.» Le capitaine : «Il dit qu?il est un passager clandestin.» L?officier britannique : «Est-ce qu?il demande l?asile politique ?» Antoni : «Je ne veux pas retourner en Pologne.» Le capitaine : «Il dit qu?il veut retourner en Pologne.» L?officier britannique : «Est-ce qu?il veut retourner en Pologne ?» Etc. (à suivre...)