Image A l?entrée de Sidi Salem, sur plusieurs centaines de mètres, s?étale une cité sans nom. C?est un agglutinement de baraques de parpaing, décorées de corde à linge où sont suspendues les lessives des mères de famille vivant, et enfantant de nouvelles générations, dans une promiscuité insupportable. Au-dessus de chaque logis, dont on peut toucher le plafond en levant le bras, trône une antenne parabolique. Entre chaque groupe de baraques, une étroite rigole creusée tout le long, véritable égout à ciel ouvert vient se jeter dans le collecteur de la rue principale. L?odeur pestilentielle qui plane sur cette agglomération humaine est telle que l'on a peine à croire que ce bidonville se trouve à quelques kilomètres seulement de La Coquette, de Beau-Séjour ou de St Cloud? «Nous attendons que les bâtiments en construction soient terminés pour être relogés», dit une frêle jeune fille en hidjab accompagnée de sa mère, debout à la station de bus. Elles désignent d?un coup d??il des carcasses de bâtiments en construction, un chantier qui, pour le moment, ne présente aucun signe d?activité. «Les gens attendent, pleins d?espoir chaque étage qui se construit, dit la mère dans un sourire. Regarde ces vieux? ils restent du matin au soir face aux bâtiments, à attendre?». La jeune fille ajoute : «Nous avons tous été recensés et nous serons tous logés un jour ou l?autre?» «Le vote ?, répond-elle à ma question? Peuh ! Nous n?y croyons pas ici.» La mère, qui a perdu son sourire, acquiesce d?un signe de tête. La fille, visiblement instruite, continue : «On nous a promis tellement de choses et personne n?a rien fait pour nous, ici à Sidi Salem? Nous sommes restés des décennies dans ces baraques, certains ont fui le terrorisme, d'autres par pauvreté ont quitté leurs terres? Chaque président ressemble aux autres.» «Le vote, le vote ! ajoute la mère, une fois qu?on a voté, on nous oublie.» La campagne électorale n'est apparemment pas la priorité des habitants de Sidi Salem, pas plus que l?hygiène de leur environnement. Les rues sont d?une incroyable saleté. Les détritus sont partout : le long des rares trottoirs, sur les terrains vagues et même sur les toits des commerces, sous les bâtiments, jetés visiblement des fenêtres.