Portrait n Salim El-Amri, 44 ans, est un passionné de musique targuie, dont il collectionne les bandes sonores avant de les reproduire, après arrangement, sur CD. Jusque-là, rien de bien extraordinaire, sauf que Salim El-Amri ne met pas ses enregistrements dans n'importe quelle pochette. Peintre de talent, il fait appel à son penchant pour les arts plastiques pour illustrer des jaquettes qu'il peint à l'aide de teintes de son cru, préparées à base de plantes poussant dans la vaste région de l'Ahaggar. Pas de pochettes en plastique pour une musique de 6 000 ans ! Les motifs dessinés sont inspirés de la nature, des vêtements traditionnels et du patrimoine remarquable des Touareg. Chaque jaquette est une œuvre à part, ne ressemblant à aucune autre, au point qu'elle apparaît, pour quiconque pénètre son atelier au centre-ville de Tamanrasset, appartenir à une autre époque très lointaine. C'est ainsi qu'il valorise ce patrimoine ancestral afin, dit-il, d'«attirer, par le contenant, le touriste avant même qu'il n'entende la vraie musique du Grand Sud et compléter son enchantement». L'idée de cette jaquette confectionnée artisanalement lui a été inspirée, assure Salim, par la richesse de cette musique qu'il a découverte auprès de musiciens diffusant leur art aux quatre coins de l'Ahaggar. Des sons «véritablement authentiques, d'une profondeur captivante et porteuse de grandes valeurs humaines», souligne-t-il avant d'ajouter que les morceaux dont il assure l'arrangement «conservent leurs tonalités authentiques, telles qu'elles résonnent autour de l'Assekrem depuis des milliers années». Salim affirme avoir commencé en 1994 son voyage dans la musique targuie en mettant sur pied un studio numérique d'enregistrement. «Le premier à l'échelle nationale», soutient-il fièrement. Il débuta alors sa quête de cette musique dans les villages et les campagnes de Tamanrasset et dans tout l'Ahaggar. «Mes enregistrements des musiciens et des chanteurs targuis, je tiens à les faire en plein air, car cela aide, dit-il, les artistes à mieux exprimer leur talent et à révéler pleinement leurs capacités sonores et artistiques». «Cela les met en totale communion avec la nature», affirme Salim. Ainsi, en dehors de son activité de technicien à «Radio Ahaggar», la station de radio locale, Salim consacre de longues heures à enregistrer et à arranger les morceaux de musique provenant de divers instruments dont tazmareth ou imzad (flûte). Le grand vœu de Salim est de réaliser une «maison des artistes» près de Tamanrasset. Une maison qui constituera, dit-il rêveur, «une galerie pour mettre en valeur les trésors artistiques et les œuvres d'art puisés dans le patrimoine millénaire d'une si vaste et si belle région».