Vision n «Le théâtre est un acte culturel, dans le sens où l'on invite les gens à un partage de quelque chose qui est fondamental, et pour le public et pour l'artiste. Le théâtre n'est pas un souk». L'auteur, comédien et metteur en scène, Slimane Benaïssa, a rappelé, hier, lors d'une conférence de presse au siège du quotidien El Watan, que le théâtre est en premier lieu un acte culturel qui s'adresse à l'intelligence du public en lui apportant quelque chose d'agréable et pas un souk. Cette conférence était consacrée à son nouveau spectacle El Moudja Wellat (Le retour de la vague). Il a précisé que les gens, à travers le théâtre, ont besoin d'entendre ce qui leur correspond, leur parle et parle de leurs maux, de leurs préoccupations. «Notre société a besoin d'exprimer sa douleur. Il est de notre devoir, nous, hommes de théâtre, de dire à la société ce qu'elle ne peut pas se dire. Nous ne pourrons jamais avancer dans le déni de soi et des choses», a-t-il dit. Le metteur en scène a, en outre, relevé que la production théâtrale actuelle souffrait d'un manque d'écriture. A ce propos, il a annoncé un projet de création d'un atelier d'écriture, en collaboration avec le Théâtre régional de Tizi Ouzou où il enseignera à des auteurs dramaturges la maîtrise de l'écriture théâtrale. Concernant sa nouvelle création, un monologue qui sera présenté demain soir à la salle Sierra Maestra (Alger), après l'avoir joué en mai aux théâtres régionaux de Béjaïa et Tizi Ouzou et dans la région de Beni Yezguen, Slimane Benaïssa a précisé qu'il aborde l'histoire de l'Algérie de 1945 à nos jours. Ce travail, ajoute-t-il, s'inscrit dans la continuité de ses œuvres, en l'occurrence Boualem zid el gouddem, Babour ghraq et Rak khouya ou ana chkoune, sans aucune connotation autobiographique. Le texte de son nouveau spectacle comprend des extraits des pièces en question qu'il prévoit de monter l'année prochaine dans la version initiale pour célébrer ses 40 années de carrière artistique, a-t-il précisé. Interrogé sur le choix de la salle Sierra Maestra pour présenter son monologue, au lieu du Théâtre national algérien (TNA), Slimane Benaïssa dira : «Ce spectacle est prêt depuis 2004. Je l'ai proposé en 2006 au directeur du TNA. Il m'a dit qu'il était surbooké jusqu'à 2012... C'était sa réponse officielle.» Concernant la pièce qu'il devait monter sur le philosophe soufi, El-Hallaj, avec l'écrivain Amin Zaoui, Benaïssa a affirmé qu'il avait pris la décision de bloquer ce projet en raison des conditions de travail qu'il juge «inadéquates». Né à Guelma en 1944, Slimane Benaïssa est l'un des pionniers du théâtre populaire algérien. En 1978 il crée sa propre compagnie de théâtre indépendant au sein de laquelle il met en scène Boualem zid el gouddem, écrit et met en scène Youm el djem'a (le vendredi), El mahgour (Le méprisé), Babour ghraq (Le bateau coule), cette pièce qui sera jouée plus de 500 fois en moins de six ans, et Rak khouya ou ana chkoune ?. Après plus de vingt années d'activité théâtrale en Algérie, Slimane Benaïssa est contraint, en 1993, à l'instar de Sid Ahmed Agoumi, de s'installer en France, après l'assassinat de deux géants du théâtre algérien, Abdelkader Alloula et Azzedine Medjoubi.