L'auteur, comédien et metteur en scène, Slimane Benaïssa, a souligné, mardi soir à Alger, que le discours théâtral doit être inscrit dans le vécu et proche de la réalité que vit la société. «Je suis un homme de théâtre, donc je suis un homme du vécu. Je dois traiter à travers cet art ce que vivent les gens. Dans le théâtre, il faut tenir un discours de la vie, un discours qui s'inscrit dans le vécu et proche de la réalité, afin de permettre au public, à la fin d'une représentation, de discuter et de clarifier certains problèmes», a-t-il indiqué lors d'une conférence-débat organisée par le quotidien Algérie-News. Abordant la question du théâtre algérien en dehors des frontières du pays, Slimane Benaïssa, ce dramaturge qui se considère comme un «exilé», a précisé que le métier d'un artiste vivant l'exil, notamment, un homme de théâtre, «l'impliquait dans la responsabilité de son pays, donc il ne vit pas son exil de la même manière qu'un autre individu». «Je n'ai pas quitté l'Algérie pour aller évoluer en France. Je suis parti là-bas avec un potentiel. D'ailleurs, les pièces de théâtre que j'ai présentées à l'étranger démontrent la continuité dans ma réflexion et mes démarches. J'ai toujours été ici (Algérie) même en étant ailleurs», a-t-il répondu à une question relative aux raisons de son «exil». Le fait que ses pièces soient jouées en langue française et que les personnages sont souvent interprétés par des comédiens étrangers, ne semble pas gêner M. Benaïssa, du moment que, a-t-il dit, «un personnage algérien peut être joué par n'importe quel comédien tant qu'il y ait chez ce dernier de l'apport émotionnel sans aucune modification ni exagération». A propos de l'utilisation de la langue française dans ses pièces de théâtre produites à l'étranger, dont Le conseil de discipline, Le fils de l'amertume», Les prophètes sans dieu et Mémoire à la dérive, M. Benaïssa a fait comprendre qu'il s'agit d'une sorte de «résistance» car le thème abordé dans ces pièces «n'a concerné que le contexte algérien». « J'écris en langue française. Je n'ai aucun problème avec elle. Moi, je reste toujours moi en utilisant cette langue qui est venue vers nous par la force. Donc, aujourd'hui je me l'approprie et j'en fais ce que je veux face aux Français», a-t-il dit, ajoutant :«Nous les artistes, nous avons une responsabilité à assumer sur le territoire de l'autre.» Invité à apporter son avis sur la situation du théâtre en Algérie, M. Benaïssa a estimé qu'il y a actuellement un environnement à construire car les «potentialités» et les «enthousiasmes» existent, seulement, le champ théâtral baigne, selon lui, dans une amère désorganisation». Né à Guelma en 1944, Slimane Benaïssa est l'un des pionniers du théâtre populaire algérien. En 1978, il crée sa propre compagnie de théâtre indépendant au sein de laquelle il met en scène Boualem zid el gouddem et il écrit et met en scène Youm el djem'a (Le vendredi), El mahgour (Le méprisé), Babour ghraq (Le bateau coule), qui sera jouée plus de 500 fois en moins de six ans, et Rak khouya ou ana chkoune ?, (Au-delà du voile), selon sa biographie. Après plus de vingt années d'activité théâtrale en Algérie, Slimane Benaïssa est contraint de s'installer en France à partir de 1993.