Chiffre n Le bilan de la police pour les dix derniers mois de l'année 2010 fait état de pas moins de 1 359 agressions sexuelles contre les enfants. Les services de la protection des mineurs parlent d'une moyenne mensuelle de 90 victimes par mois. A titre illustratif, le service a enregistré, au mois de novembre 2010, 94 agressions contre 171 au mois d'octobre de la même année. «Cette forme de criminalité touche aussi bien les filles que les garçons avec une moyenne de 90 agressions par mois», explique Kheira Messaoudène, commissaire principale de la police chargée de la protection des mineurs. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, le prédateur «n'a pas de profil particulier. Il peut être chômeur, cadre ou fonctionnaire, issu de différentes couches de la société», témoigne Mme Messaoudène, qui appelle les parents à faire preuve de plus de vigilance. «Les enquêtes de police ont démontré que le pédophile peut parfois être la personne que l'on soupçonne le moins, un parent, un voisin, un ami…». Les lieux de prédilection de l'agresseur se limitent, quant à eux, aux endroits isolés et peu fréquentés, selon l'intervenante. «Le prédateur choisit souvent des endroits isolés, comme les cages d'escalier, les toilettes, les coins isolés, des jardins publics…», affirme-t-elle. «On a du mal à comprendre et à admettre à notre niveau comment des parents peuvent laisser leurs enfants en bas âge jouer à l'heure de la sieste ou tard la nuit, dans des endroits déserts ?», s'interroge-t-elle. «La part de responsabilité des parents est très importante. Il faut savoir que le timing et l'endroit, ajoutés à la vulnérabilité des enfants sont des facteurs déterminants pour l'agresseur. A ne pas oublier la passivité des citoyens, qui encourage la criminalité en général. Les parents doivent apprendre à s'inquiéter pour leurs enfants et leur apprendre à connaître leur corps et à se protéger», poursuit-elle. Mme Kheira Messaoudène affirme également que les parents sont généralement perdus face à ce genre de problèmes. Si certains osent franchir le pas en déposant plainte, d'autres choisissent le silence par peur du qu'en-dira-t-on. «Les parents qui refusent de déposer plainte considèrent l'agression comme une affaire de famille, puisque l'agresseur n'est autre qu'un membre de la famille», souligne Mme Messaoudène. Pour notre commissaire, les affaires de pédophilie revêtent un caractère particulier. «Le manque de communication entre les parents et les enfants conforte généralement l'agresseur. Celui-ci n'hésite pas à continuer à abuser de sa victime, tant que celle-ci n'ose pas le dénoncer, d'où l'importance de la communication au sein de la cellule familiale», affirme-t-elle. «Les parents doivent prendre conscience de l'importance de la communication avec leurs enfants. Ces agressions traumatisent les enfants. Certains ne pouvant se confier à leurs parents continuent à souffrir en silence.» Pour les parents qui choisissent, en revanche, de porter l'affaire en justice, l'enfant est auditionné par le juge qui, généralement, reconnaît l'existence d'une circonstance aggravante. Une situation dont il tient compte dans la détermination de la peine. Ce phénomène, qui, selon Mme Messaoudène, n'est pas nouveau, a pris, ces dernières années, de l'ampleur à la faveur de l'ouverture médiatique, des chaînes satellitaires et de l'Internet. Autant de facteurs ayant influé sur le comportement des Algériens qui souffrent déjà d'«une véritable crise morale», conclut-elle.