Résumé de la 3e partie n Fort de l'arrêt rendu par la justice irlandaise, Dennis Corcocan confie sa fille Molly à sa mère... Des messieurs en imperméable et chapeau mou attendent donc Dennis lorsqu'il descend la passerelle du bateau : «Vous êtes Dennis Corcocan ? — Oui. — Vous êtes arrêté. — Arrêté, moi ? Qu'est-ce que j'ai fait ? — Vous êtes arrêté pour «mépris du Tribunal». — Quel tribunal ? — Vous contrevenez au jugement de la justice de Sa Majesté puisque vous ne restituez pas votre fille Molly à sa mère à la garde de laquelle elle a été confiée.» C'est ainsi que le placide Dennis Corcocan se retrouve en prison. Evidemment, il y aurait pour Dennis Corcocan un moyen de recouvrer sa liberté, ce serait de reconnaître sa faute et de restituer l'enfant, ce qu'en bon Irlandais têtu il refuse. Lorsqu'il le fera, il sera trop tard : lorsqu'on mêle à ses affaires une belle-mère, un avocat, la justice, la religion et le chauvinisme, le moindre incident dans un ménage peut devenir une affaire planétaire. Même un homme tranquille comme le placide Dennis Corcocan supporte mal la prison. Même Irlandais avec la tête dure, le régime pénitentiaire finit par vous assouplir. Après trois mois de réflexion solitaire dans sa cellule, Dennis Corcocan écrit à sa femme Beatrice qu'il est prêt à un arrangement... Il propose que l'enfant soit confié chaque année six mois à Beatrice et six mois à lui-même, à tour de rôle. Dans le petit appartement de Southampton où elle vit désormais seule, Beatrice lit la lettre de son ex-mari. Autour d'elle sa famille. Des Anglais. Rien que des protestants qui la regardent inquiets tandis qu'elle réfléchit. La mère de Beatrice est indignée : «Qu'est-ce que c'est que cette combine ? Six mois l'un, six mois l'autre ! Six mois Irlandais. Six mois Anglais. Six mois protestant. Six mois catholique. Six mois dans une école. Six mois dans une autre.» Finalement Beatrice relève la tête : «Vous avez raison, maman ! J'aurai l'enfant et je l'aurai pour moi seule.» Au mois de juillet de l'année suivante, soit après un an de prison, le malheureux Dennis à bout de résistance capitule : il s'offre à présenter à la Cour ses plus humbles excuses et s'engage à faire revenir l'enfant. Dans le petit village de Bishopswood, Mary Corcocan la grand-mère, assise à la table de la salle commune près de la cheminée, promène sur les hommes de loi et les notables locaux qui l'entourent le regard affreusement clair de ses yeux verts. Elle pose sur la table la lettre qu'elle vient de recevoir de son fils, lui demandant d'envoyer Molly en Angleterre. «Je n'y crois pas... dit-elle. — Comment, vous n'y croyez pas ? — Non. Mon fils ne peut pas avoir écrit en toute liberté une lettre pareille !» Et avec un bon sens qui rejoint la folie tout comme la loi souvent dépasse l'absurde, elle explique : «Si mon fils n'était pas en prison, il n'aurait pas écrit cette lettre. Il a écrit cette lettre parce qu'il est en prison. Il l'a écrite pour être libre donc s'il me demande d'envoyer sa fille en Angleterre c'est sous la contrainte. Et vous appelez ça de la justice ? Je refuse ! Si mon fils revient en Irlande, si je le vois ici, dans cette maison, libre d'agir comme bon lui semble, alors il fera ce qu'il voudra. S'il décide d'emmener la petite en Angleterre, il l'emmènera. En attendant je refuse. Il pourrait m'écrire cinquante lettres depuis sa prison que ce serait inutile.» (A suivre...)