Témoignage - C'est dès l'enfance que Chabha se met à confectionner des poupées. Dans la famille, c'est une véritable tradition. Mais, à cette époque-là, elle ne se doutait absolument pas que cet art traditionnel lui ferait un jour décrocher une bourse hors de nos frontières. Avec une telle affirmation, Mme Benali n'exagère en rien. Au fil des ans, la trame d'une réelle histoire s'est construite entre elle et la poupée. Issue d'une famille maraboutique de Kabylie, Mme Benali, née Babou Chabha, n'avait jamais imaginé tracer sa destinée dans ce domaine. Initiée dès son jeune âge à la confection des poupées, c'est en 1969 que Chabha franchit le seuil de la maison familiale pour enseigner aux jeunes filles certains travaux manuels, à l'image de la fabrication de la poupée dans un centre installé dans son village Sid Ali Moussa à Maâtkas (Tizi Ouzou). Ce centre artisanal initié par une association norvégienne d'aide à la femme a pu, en quelque temps, s'imposer et enregistrer un nombre important de filles à la recherche d'un savoir-faire manuel. En 1971, Chabha à peine âgée de 18 ans organise une exposition de poterie et de poupées traditionnelles en Norvège. Suite à quoi, elle est primée par le roi de Norvège qui a décidé de lui offrir une bourse de quatre ans pour l'aider à améliorer ses connaissances en matière de métiers artisanaux. Une bourse dont elle n'a pu profiter pour des considérations sociales et familiales. «Toute la presse norvégienne parlait de moi vu mon âge et mon origine maraboutique, ces familles dont les filles ne sortaient pas», raconte-t-elle, non sans fierté. Aujourd'hui enseignante dans un centre de formation situé à Dély-Ibrahim à Alger, Chabha revient sur sa vie. Des défis, des concessions, des réussites et l'indélébile attachement à la poupée. «Je me suis inspirée de notre poupée faite avec du roseau. Mes poupées sont fabriquées avec du fil de fer, du coton, le corps revêtu de bas. Tous les trois mois, un camion de la Snat (Société nationale de l'artisanat traditionnel) venait faire le plein de nos poupées destinées à la vente », raconte-t-elle. Chabha fabrique très peu de poupées depuis quelques années. Elle l'affirme pourtant avec un ton de reconnaissance : «Oui à un certain moment de ma vie, la poupée me faisait vivre.» A l'origine, «la poupa» L'appellation poupée vient du latin «poupa», qui signifie mamelle ou sein. Cela exprime la relation entre la femme et l'enfant. Généralement, quand l'enfant joue à la poupée, il imite la maman et le monde adulte. Donc, la poupée est une représentation en miniature de l'univers des adultes aux yeux de l'enfant, et cela pour l'en rapprocher. La plus ancienne poupée de l'Histoire remonte à l'époque pharaonique. Le corps de la poupée était en bois, les cheveux de perles d'argile. Aussi se servait-on dans cette fabrication d'os et d'ivoire. Le fait que les Pharaons croyaient à une vie au-delà de la mort, en emportant dans leurs tombes tous les objets qui leur seraient utiles, a permis de retrouver des traces de poupées antiques.