Avertissement - A quatre jours des élections, le parti islamiste a prévenu contre une «manipulation des résultats» et dénoncé par anticipation toute tentative de l'écarter du futur gouvernement par un jeu d'alliances. Pour Rached Ghannouchi, le président du parti, «il y a un risque de manipulation des résultats des élections». «Les surprises sont toujours possibles. S'il y a une manipulation, nous rejoindrons les forces et les gardiens de la révolution qui ont fait tomber Ben Ali et les premiers gouvernements (intérimaires)», a-t-il indiqué lors d'une conférence de presse hier à Tunis. Le fondateur du mouvement islamiste, durement réprimé sous le régime de Ben Ali, a rappelé que son parti était «en tête» de tous les sondages. Le leader d'Ennahda a haussé le ton alors que plusieurs partis progressistes ont entamé des pourparlers en vue d'une coalition pour faire barrage aux islamistes au sein de la future assemblée. «Si de petites formations se coalisent contre Ennahda, au cas où il remporterait les élections, je peux dire, dans ce cas là, qu'il s'agira d'un coup de force contre la démocratie», a-t-il affirmé. Hier soir, un membre du bureau exécutif du même parti islamiste, Ali Larayedh, a fait tout un autre discours, en déclarant que Ennahda accepterait le résultat d'élections «transparentes» et réaffirmé sa confiance dans le processus, après les vives réactions de partis progressistes. «Nous accepterons les résultats du vote, du moment que ces élections sont intègres et transparentes. Nous allons féliciter tout le monde et coopérer avec eux (les autres partis) pour l'avenir de la Tunisie», a-t-il affirmé. Ali Larayedh a tenté d'atténuer la portée des propos tenus par le président du parti dans la matinée et «mal interprétés» selon lui. «En cas de fraude - chose que nous ne pensons pas devoir se produire - le peuple tunisien qui a fait la révolution contre la dictature ne permettra pas qu'on lui vole ses rêves et nous serons avec lui pour défendre les objectifs de la révolution», a-t-il dit. Pour leur part, deux grands partis du centre gauche, le Parti démocrate progressiste (PDP) et Ettakatol, ont immédiatement réagi, appelant au respect des règles démocratiques et renouvelant leur confiance dans la commission électorale. «ça n'a aucun sens. Il faut accepter la règle de la majorité. La meilleure solution serait de parvenir à un accord par consensus (pour former le prochain gouvernement), mais en tout état de cause, ce sont les règles démocratiques qui doivent être appliquées», a réagi Mustapha Ben Jaafar, président d'Ettakatol. Le PDP a appelé à «ne pas jouer sur les peurs». «Le grand rendez-vous du 23 octobre demande un minimum de sérénité et en particulier de la part du parti qui se dit favori du scrutin. S'il a des griefs à formuler (à l'Isie), qu'il les présente clairement. Et si de petites formations ont la majorité au sein d'une coalition, c'est le jeu démocratique», a déclaré Samy Ghorbal, conseiller du chef du PDP Ahmed Néjib Chebbi.