Tension - Une dizaine de personnes dont un policier ont été blessées hier dans des violences qui ont éclaté à Dakar. Ces heurts sont intervenus lors de la dispersion de groupes de jeunes opposants qui tentaient de participer à une manifestation interdite contre le président sénégalais Abdoulaye Wade. Pour la quatrième journée consécutive, l'opposition avait appelé à manifester «massivement» dans le centre de Dakar contre la candidature à la présidentielle du 26 février de M. Wade, 85 ans et au pouvoir depuis 2000, candidature qu'elle juge anticonstitutionnelle. Tous les accès à la place de l'Indépendance où devait avoir lieu le rassemblement avaient été bloqués par un important dispositif policier. Très vite, dans les rues et avenues adjacentes, de petits groupes de jeunes, au départ des dizaines, puis des centaines, ont affronté à coups de pierre les forces de sécurité qui ont riposté avec des balles en caoutchouc, des gaz lacrymogènes et des canons à eau. Des jeunes ont mis le feu à des barricades de pneus, poubelles et détritus avant d'être dispersés par des groupes mobiles de policiers à bord de pick-up. Des policiers ont tiré au moins à deux reprises des grenades lacrymogènes sur la voiture du chanteur et opposant Youssou Ndour, alors entouré de dizaines de fans et d'une nuée de journalistes. En quittant les lieux, son véhicule, entouré par la foule, s'est arrêté près d'un pick-up de policiers et le chanteur a fait mine de descendre. «Dégagez-moi ça!», a immédiatement crié un policier, tandis que ses hommes, cernés par les manifestants, ont lancé des lacrymogènes. La foule hostile a lancé une pluie de pierres sur la dizaine de policiers, dont l'un a été blessé à l'arrière de la tête. Un autre policier, un officier, a sorti son pistolet automatique de service pour faire reculer les manifestants. La tension semblait retomber quand trois grenades lacrymogènes ont été lancées par un officier de police à l'intérieur d'une mosquée voisine proche du marché Sandaga, où avaient trouvé refuge quelques manifestants. L'incident a enflammé la colère des fidèles, jeunes et badauds qui se trouvaient à proximité. Dénonçant un «sacrilège» ou une «profanation», ils ont invectivé les policiers sur lesquels ils se sont mis à lancer pierres et projectiles de toutes sortes, aux cris de «Allahou akbar (Dieu est grand)». L'édifice religieux, connu sous le nom de mosquée Zawiya el hadj Malick Sy, appartient aux Tidianes, l'une des deux principales confréries soufi du Sénégal, dont l'influence socio-politique est considérable dans le pays. Des dignitaires Tidianes se sont rendus sur place en début de soirée. Plusieurs centaines de fidèles ont entamé un sit-in devant la mosquée, entonnant des chants islamiques et la «chahada» (profession de foi), tandis que les affrontements se poursuivaient à quelques dizaines de mètres. - Macky Sall, candidat d'opposition au chef de l'Etat Abdoulaye Wade à la prochaine élection présidentielle au Sénégal, a estimé qu'il y aurait des troubles si ce dernier était réélu au 1er tour le 26 février, dans un entretien publié ce matin par le quotidien Aujourd'hui en France/Le Parisien. «Il y aura des troubles», a assuré M. Sall, 50 ans. «Je serai le premier à demander aux Sénégalais de descendre dans la rue pour dénoncer les fraudes électorales car Wade ne peut absolument pas gagner au premier tour», a précisé l'opposant qui a été Premier ministre de Wade entre 2004 et 2007.