Résumé de la 4e partie Par un matin pluvieux, le fils prend son père dans sa voiture pour une destination inconnue. «Je sais, attendez un petit peu? Un tout petit peu. ? Mais tu vivras cent ans. ? Alors, attendez un hiver?» La voix du vieil homme s?enroue. «Encore un hiver? C?est si beau l?hiver. ? Mais tu ne vois plus rien, papa. ? Ici, je n?ai pas besoin de voir les choses. Je sais qu?elles sont là et je les vois. Ailleurs, je serais vraiment aveugle.» Le fils sent ses yeux s?embuer. «Un hiver, répète le vieux, je ne te demande qu?un hiver. ? D?accord, papa? un hiver.» La pluie cesse, et deux heures plus tard, un camion les tire de là. «Un hiver, dit Jimmy à sa mère excédée, je lui ai promis un hiver.» Quelques semaines plus tard, la neige recouvre tout. Chaque matin, le vieil Elie, debout devant la fenêtre, son bol de café à la main, regarde, sans les voir, tomber les flocons. C?est vrai que le paysage de Jumping Creeck est admirable en hiver. Jimmy et sa mère, qui peuvent encore voir, comprennent qu?un homme qui a vécu ici, qui s?est battu ici, qui a vieilli ici, ne peut pas s?en aller vivre dans une ville. Ni même dans une de ces plaines mornes, infiniment tristes, du Middle West en hiver. Ils prennent donc leur mal en patience et attendent la fin de l?hiver. Mais après la neige arrive le grand froid, avec le blizzard. Et cette année-là, le blizzard est terrible. Un peut partout, dans le ranch immense, pour lui résister, les bêtes lui tournent le dos, se serrent en troupeau de cent ou deux cents têtes pour se tenir mutuellement chaud. Mais, chaque fois, lorsque le blizzard cesse, il reste des animaux gelés. Et la neige est très épaisse. Les vaches ne savent pas, comme les autres ruminants ou les animaux sauvages, gratter la neige pour trouver l?herbe. Elles maigrissent. Et quand une vache perd du poids, elle perd de sa valeur. Un soir, le fils, à bout de patience, s?écrie : «J?en ai marre, marre, cette fois je vends !» Le lendemain matin, alors qu?il fait encore nuit, le fils, en se levant, ne voit pas le bol de café sur la table de la salle commune. Les bottes et le manteau du vieux ne sont pas à leur place habituelle. «Tiens, le vieux est déjà sorti.» Malgré la température, le vieux sort chaque matin de bonne heure. Bien qu?il y voie de moins en moins, il dit qu?il va «jeter un coup d??il» sur les chevaux et voir comment les bêtes, qui sont près du chalet, ont supporté la nuit. Mais comme au bout d?une heure, il n?est pas revenu, un peu inquiet, le fils enfile ses bottes, un blouson de fourrure et part à sa recherche. Les traces du vieux sont presque effacées. Par moments même, elles disparaissent sous la neige poussée par le blizzard. Jimmy est de plus en plus inquiet. Les traces le conduisent sous le petit bosquet de bouleaux, puis elles longent la gorge, longtemps. Si longtemps que maintenant le jour se lève, le ciel devient clair, lumineux, d?un bleu glacé. Le soleil ruisselle du sommet de Old Castle, de la Devil?s Tooth, de la Grey Table, depuis les plateaux et les forêts de sapins. Il atteint les prairies, jusqu?au flanc des bêtes qui ont secoué la neige de la nuit. Les traces du vieil Elie quittent la gorge et vont tout droit vers un troupeau. Saisi d?une intuition, le fils se met à courir dans la neige. Ce n?est pas une intuition. En réalité, il a compris. Il sait qu?il va trouver son vieux père étendu dans la neige, raide et mort de froid au milieu de ses bêtes, au milieu du cirque grandiose de Jumping Creeck.