Résumé de la 2e partie Les Berger fils veulent vendre le ranch. A cette idée, le vieil Elie fait une horrible grimace qui montre ses dents noires. Au milieu de la nuit qui suit l?incident de l?ours, il réveille sa femme. «Quoi ? Qu?est-ce qu?il y a ? ? Je ne veux pas partir. Mais, toi, tu peux ! Je comprends que tu veuilles t?en aller pour vivre au soleil les années qui te restent. Moi, je ne peux pas partir. Je t?en prie, trouve une solution ! Par exemple, loue le ranch ! Moi je veux rester là. ? C?est ça, tout seul, avec des étrangers ? ? S?il le faut. ? Mais mon pauvre vieux, ils ne te supporteront pas quinze jours !» A quelque temps de là, Edith, étant allée passer quelques jours en ville, le fils est seul au ranch avec le vieux. Un après-midi, aidé par les cow-boys, il rassemble les bêtes descendues dans les gorges pour les en sortir avant les pluies d?automne. Soudain, il voit un nuage de fumée passer dans le ciel gris au-dessus de lui. Bizarre? Même si le vieux avait eu l?idée d?allumer du feu dans la cheminée du chalet, ça ne ferait pas une fumée pareille, si dense, avec des escarbilles. Affolé, il lance son cheval au galop à travers les pierres du torrent, remonte le sentier en forçant la bête et débouche sur la prairie. Le feu vient d?une petite maison de bois, une antique cabane de trappeurs en ruine que l?on conserve pieusement près du corral comme un monument historique. Le fils du vieux arrive au galop, saute par-dessus la barrière de bois du corral, et voyant que la fumée sort des deux petites fenêtres, se jette sur la porte. Que la maison brûle, ce n?est pas un drame? Mais pourquoi brûle-t-elle puisqu?il n?y a rien dedans ? La porte résiste quelques instants, pourtant elle n?est jamais fermée. Au troisième coup d?épaule, les gonds s?arrachent dans un craquement et l?homme se retrouve à quatre pattes au milieu des flammes et de la fumée. Dans la fournaise, il distingue une silhouette : celle de son père, assis sur un tabouret. Cette fois, c?en est trop. Pendant le reste de l?après-midi, le téléphone ne chôme pas entre Jumping Creeck et l?usine de Calgary et jusqu?aux terres à blé du Middle West, pour avertir toute la famille que le vieil Elie a voulu se suicider. «Car tu as voulu te suicider, c?est sûr ! ? Mais non, mais non, affirme le vieil homme couvert de pansements. Je voulais seulement voir si la cheminée marchait encore ! Je voulais m?installer dans la vieille maison ! C?est celle que j?ai habitée quand je suis arrivé, il y a soixante ans?» A ce souvenir, des larmes coulent sur les joues ravinées du vieil homme, entre les pansements de ses brûlures? En fin d?après-midi, la décision du fils est prise. Il en a assez. Les larmes du vieux ne l?attendrissent plus, il est trop en colère. Ce n?est déjà pas drôle de passer un hiver de plus à Jumping Creeck, mais s?il doit surveiller sans arrêt son vieux père, c?est au-dessus de ses forces. Aux autres de s?en occuper un peu ! Mais il n?en laisse rien voir. Au téléphone, il parle à mots couverts. S?il savait, le vieil Elie, que son fils le conduira demain à Calgary, Dieu sait quelle sottise il pourrait faire cette nuit ! D?ailleurs, lorsque le vieil homme est couché, Jimmy frappe à la porte de sa chambre? Il ne le fait jamais. Mais cette fois, il veut jeter un coup d??il. «Entre ! dit le vieil Elie, qui se dresse dans son lit en grimaçant de douleur. ? ça va, papa ? Tu ne souffres pas trop ?» Tandis que son fils jette un regard inquisiteur autour de lui, le vieux revient sur l?accident. «Ce n?est pas vrai que j?ai voulu me suicider. J?ai voulu voir si la cheminée marchait encore? je voudrais qu?on m?installe dans la cabane. J?y serais très bien dans cette cabane, et je ne vous embêterais pas. ? Ce n?est pas possible, papa. ? Mais pourquoi ? ? On en parlera demain, si tu veux bien», dit lâchement le fils en refermant la porte. (à suivre...)