Quadrillage - Un nouveau coup d'Etat militaire était accompli hier en Guinée-Bissau après l'arrestation du président intérimaire, du Premier ministre et du chef d'état-major. Deux semaines à peine avant la présidentielle prévue pour le 29 avril, Bissau, la capitale est désormais complètement quadrillée par les soldats. Un «commandement militaire» installé à l'état-major a justifié ces nouveaux troubles dans la région, trois semaines après un putsch au Mali, en dénonçant un «accord secret» conclu entre l'exécutif et l'Angola. Dans ce pays très instable, les rumeurs de coup d'Etat se faisaient insistantes depuis des jours, à l'approche du second tour. «L'armée confirme avoir déposé le président intérimaire Raimundo Pereira, le Premier ministre Carlos Gomes Junior et le chef d'état-major, le général Antonio Indjai. Les trois sont sains et saufs et se trouvent sous contrôle de l'armée», dit un communiqué daté d'hier soir, levant toute ambiguïté sur ce qui se tramait depuis la veille. L'assaut, condamné par l'ONU et la Maison blanche, a été lancé jeudi soir, principalement sur la résidence à Bissau de Carlos Gomes Junior, homme fort de l'exécutif et favori du scrutin. Sa maison a été attaquée à la roquette, pendant que des militaires prenaient le contrôle de la radio nationale et bouclaient la ville. Carlos Gomes Junior a été «conduit à la base de San Vicente», à 45 km au nord de Bissau, a-t-on appris de sources militaire et diplomatique. Le lieu de détention du président Pereira et du général Indjai n'était pas connu. Plusieurs responsables politiques ont également été arrêtés et conduits au siège de l'état-major, selon une source militaire. Hier, vendredi, les soldats ont quadrillé la ville, à pied ou en pick-up. Certains étaient postés devant des ministères et le siège du Parti africain pour l'indépendance de la Guinée-Bissau et du Cap-Vert (PAIGC, au pouvoir). La radio publique, coupée depuis jeudi soir, a recommencé à émettre. Elle diffusait exclusivement de la musique et des communiqués laconiques émanant du «commandement militaire». Le «commandement» a assuré n'avoir «aucune ambition pour le pouvoir» et a proposé un «gouvernement d'union nationale» lors d'une réunion avec les partis politiques. Mais il s'y attribue d'office les ministères de la Défense et de l'Intérieur, et a décrété un couvre-feu de 21H00 à 06H00 (locales et GMT). Les putschistes ont pour la première fois, montré leur visage. Les militaires prétendent avoir voulu contrer les «manœuvres» du gouvernement destinées à «faire éliminer les forces armées bissau-guinéennes par une force étrangère». Ils dénoncent un «accord militaire secret» conclu selon eux entre le pouvoir et l'Angola. En cause: la mission militaire angolaise (Missang) présente depuis 2011 dans le pays et qui servait, selon les militaires bissau-guinéens, à «protéger le gouvernement en cas de crise». Pourtant, le chef de la diplomatie angolaise, Georges Chicoty, avait annoncé lundi à Bissau le prochain retrait de la force comptant au moins 200 éléments.