Audience - Près de onze ans après les attentats du 11-Septembre, leur cerveau autoproclamé et quatre de ses complices ont été mis en accusation, hier à Guantanamo. Vêtus de tuniques blanches, coiffés pour certains d'un turban de la même couleur, les cinq hommes ont gardé le silence toute la journée, assis dans la salle d'audience à une certaine distance les uns des autres. Au terme d'une audience de plus de 13 heures, où les suspects ont joué la montre, dans une tentative apparemment concertée de retarder l'échéance, ils ont été accusés du meurtre de chacune des 2 976 victimes des attaques de 2001 aux Etats-Unis. Khaled Cheikh Mohammed, un Pakistanais de 47 ans, qui a revendiqué la paternité des attentats «de A à Z», son neveu de même nationalité, Ali Abd al-Aziz Ali, mais aussi les Yéménites, Ramzi ben al-Chaïba et Wallid ben Attach et le Saoudien Moustapha al-Houssaoui, encourent la peine de mort. Les cinq hommes ont passé la journée le regard rivé sur leurs genoux, se penchant de temps à autre pour chuchoter. Certains lisaient un livre qui semblait être le Coran ou se passaient le périodique The Economist. Deux d'entre eux se sont levés et se sont agenouillés pour prier, provoquant une interruption des débats. Ils ont refusé de plaider coupables ou non coupables. «L'accusé refuse de répondre», a répété inlassablement le juge, pour chacun des cinq accusés qui refusaient tour à tour de répondre à ses questions sur leur représentation. Seul le Yéménite, Ramzi ben al-Chaïba, a rompu le mutisme de ses co-inculpés pour protester contre le traitement que l'armée américaine réserve à ces détenus de «haute valeur». «L'ère de Kadhafi est finie, mais on a Kadhafi ici», a subitement crié le Yéménite Al-Chaïba, dans une évocation évidente des traitements subis pendant leur détention dans une prison secrète de la CIA et depuis leur transfert à Guantanamo. «Vous allez nous tuer et dire ensuite qu'on s'est suicidés», a-t-il encore lancé. Très calme, Khaled Cheikh Mohammed, mieux connu sous les initiales anglaises KSM, portait une longue barbe teinte au henné. Il a été vu pour la dernière fois devant un tribunal militaire le 21 janvier 2009, après l'investiture de Barack Obama, qui avait suspendu la justice militaire d'exception très critiquée. Son avocat a indiqué que son client était «extrêmement préoccupé par l'équité de cette procédure». Le juge a voulu s'assurer que c'était «par choix» qu'il ne répondait pas. L'échange qui a suivi a été censuré pendant plusieurs minutes par l'autorité militaire. Un porte-parole du Pentagone, Todd Breasseale, a indiqué que cette procédure de mise en accusation aurait dû prendre entre deux et trois heures, au lieu de plus de treize heures. Mais «le procès du siècle» comme l'appellent certains observateurs, pourrait ne pas commencer avant mai 2013.