Versions De toutes les légendes autour du Tombeau, la plus belle est celle du trésor et du berger. A cinquante-huit kilomètres d?Alger et à une dizaine de Tipaza se dresse un impressionnant monument, legs de l'antiquité libyco-berbère : un monument qui ressemble à une immense ruche posée sur l'une des hauteurs du Sahel. On l'a longtemps appelé Qbar Al-Rumia, le Tombeau de la Chrétienne, à cause sans doute du décor en croix de l'une des portes mais on sait aujourd'hui que le monument est largement antérieur au christianisme. C'est d'ailleurs pourquoi, à l'indépendance, il a été rebaptisé : Mausolée royal de Maurétanie parce que l'on croit savoir qu'il a servi à abriter la dépouille d'un souverain berbère, plus précisément l'épouse d'origine égyptienne du roi numide Juba II. Mais c'est là une autre version que nous examinerons plus loin, après avoir évoqué la belle légende que la mémoire populaire rattache à ce lieu. Quand on interroge les personnes âgées à propos du Tombeau, on a des réponses assez variées : on évoque bien sûr l'hypothèse d'une reine chrétienne qui y aurait été enterrée à l'époque des Romains. Et quand on demande ce que l'on sait de cette reine, les réponses sont évasives : c'est une reine chrétienne, c'est tout, du temps de Sidna Aïssa, Jésus. Des auteurs européens ont contribué à répandre cette légende en l'empruntant à une tradition locale. On sait, par exemple, que l'Espagnol Marmol, un officier de Charles Quint, a consacré des passages de sa description de l'Afrique au Tombeau, soutenant qu'il contiendrait les restes de la fille du comte Julien, enlevée et séduite par les Wisigoths. Marmol explique que c'est pour venger cet affront que le comte autorisa les Musulmans du Maghreb à passer le détroit de Gibraltar et à occuper l'Espagne. D'autres personnes écartent systématiquement l'hypothèse de la reine chrétienne : le Tombeau a été construit par des géants, pour recevoir la dépouille d'un géant. Sinon comment expliquer sa taille gigantesque ? Il y a aussi la croyance que le Mausolée est l'?uvre d'esprits, génies ou fées, qui l'ont construit pour cacher leurs trésors. On croit même connaître le nom de l'une de ces fées qui hante les lieux : H'alula, la bien nommée, dont on entend la voix, les jours de vent, transportée jusqu'aux villages et hameaux de la montagne. Certains affirment même l'avoir vue, toujours par temps de vent ou d'intempéries : elle a, comme toutes les fées, une forme diaphane, elle est belle comme un c?ur et, contrairement aux génies, elle n'inspire pas la peur. Et les trésors du Tombeau ? «Ils ont été pillés !» disent les uns. «Ils sont toujours dans le Tombeau, disent les autres, et attendent d'être découverts». Les pillards ont pris beaucoup de richesses mais celles-ci, enfouies dans le sol ou des chambres secrètes sont pratiquement inépuisables. Si aujourd'hui on sait comment entrer dans le Tombeau, on ignore toujours où se trouvent les trésors des fées ! Mais de toutes les légendes autour du Tombeau, la plus belle est celle du berger qui y découvre, grâce à sa vache, un trésor. (à suivre...)