Débat n Des universitaires espagnols ont soulevé la problématique de la traduction des œuvres d'auteurs algériens et de pays arabes vers la langue espagnole et inversement. La traduction dans le domaine de la littérature se révèle le meilleur moyen de rapprochement et de compréhension des peuples et des cultures. «La traduction peut être considérée comme un apport considérable dans le dialogue interculturel et le renforcement des relations entre les sociétés», s'accordent à dire Rafael Bustos, de l'université de Madrid et chercheur associé à l'Institut de recherches et d'études sur le monde arabe et musulman de France, et Luis Bernabé Pons, professeur d'études arabes et islamiques à l'Université d'Alicante. Il se trouve que la traduction s'avère une sérieuse problématique, car elle constitue un véritable maillon faible dans les relations culturelles entre les deux pays, à savoir l'Algérie et l'Espagne. C'est la raison pour laquelle les deux intervenants ont mis l'accent, lors d'une conférence, jeudi, à l'Institut Cervantès, sur la nécessité de développer ce secteur porteur de nouvelles idées et ouvert à l'universalité. Ils ont estimé qu'«un champ énorme s'ouvre à nous dans le cadre de la collaboration, dans le domaine de la traduction». Si les conférenciers se sont dit effarés d'apprendre que des œuvres espagnoles, notamment ‘Don Quichotte', une œuvre à la fois magistrale et universelle de Miguel Cervantès, n'est pas traduite vers l'arabe, ils reconnaissent néanmoins que des écrivains algériens, qu'ils soient de graphie arabe ou d'expression française, sont très peu traduits. «La littérature algérienne est très peu connue en Espagne. Rares sont les auteurs qui sont traduits de l'arabe ou du français vers l'espagnol, hormis Yasmina Khadra, Assia Djebar ou encore Malika Mokadem». La traduction des auteurs algériens reste limitée, elle est restreinte à la sphère universitaire. Sa visibilité demeure minime. Les deux intervenants reconnaissent, par ailleurs, que les œuvres algériennes traduites sont celles qui sont publiées dans le circuit éditorial français. «Ce qui est édité en France, est traduit en Espagne». Pour eux, ce qui est traduit répond à un coup de marketing médiatique. «On suit le mouvement de ce qui marche en France et on le traduit», ont-ils expliqué, ajoutant : «Il y a toutefois des auteurs qui sont publiés sans passer par le marché français, mais cela est insignifiant du point de vue de la quantité éditoriale.» «Généralement, on tient compte en matière de traduction des œuvres européennes ou nord-américaines, et rarement l'édition espagnole s'intéresse à la littérature de la rive Sud, notamment celle du Maghreb», ont-ils regretté. Les universitaires se sont également accordés à dire que le travail dans le domaine de la traduction doit se faire dans les deux sens afin d'assurer un meilleur rendement et un rapprochement durable. En d'autres termes, «la coopération culturelle entre les deux pays mérite d'être creusée davantage» ont-ils estimé, insistant sur «les ponts à bâtir», en évacuant «les stéréotypes et les préjugés». Yacine Idjer l Rafael Bustos et Luis Bernabé Pons affirment, en outre, que le métissage culturel constitue une autre voie menant au rapprochement et à la compréhension des peuples. «Le métissage et la fusion donnent lieu à de nouvelles formes d'expression artistique et culturelle», ont-ils souligné. Et c'est ce qui s'est passé d'ailleurs lorsque les musulmans sont entrés en contact avec les Espagnols.Cette rencontre, voire cette fusion est visible dans l'architecture, la musique et bien d'autres domaines relatifs à l'art et à la culture. D'ailleurs, les deux rives, ibérique et nord-africaine, notamment algérienne, continuent jusqu'à aujourd'hui à entretenir des relations de coopération dans divers secteurs, dont notamment celui de la culture. L'Algérie et l'Espagne ont une histoire commune qui remonte au XVIe, basée sur le partage du savoir et des connaissances, et, «depuis l'époque de l'Andalousie, les deux pays n'ont jamais été déconnectés et ont connu une évolution historique partagée», même si les relations entre les deux pays ont été, tout au long de leur histoire commune, tantôt conflictuelles tantôt sereines. Les deux intervenants ont indiqué que «même si la Méditerranée nous sépare, l'histoire nous rapproche». «Actuellement, il y a un énorme champ de collaboration à explorer et à exploiter, en particulier dans le domaine universitaire et de la recherche en histoire», ont-ils poursuivi. Ainsi, la coopération culturelle entre l'Algérie et l'Espagne mérite d'être exploitée davantage pour jeter des ponts culturels durables entre les deux pays et mettre en évidence les domaines qui les rapprochent. Y. I.