Un jeune chanteur de raï a été retrouvé assassiné dans sa chambre. Cela s'est passé à Zéralda. Un fait divers qui sera vite oublié puisqu'un autre drame viendra aussitôt le reléguer au second plan et ainsi de suite. La violence est devenue si coutumière qu'elle a pris l'allure de simples informations qu'on parcourt dans nos gazettes comme autant d'événements inscrits dans une triste fatalité. Aujourd'hui, dans cette Algérie qui célèbre le cinquantenaire de son indépendance, on joue du couteau pour rien, un regard de travers, une place de parking, le vol d'un téléphone portable, une petite dette pas honorée... des futilités qui génèrent vite l'inévitable, un coup de colère, la lame qu'on exhibe et le coup fatal. Il fut un temps où le moindre crime qui se passait dans notre immense pays, faisait l'objet de longues discussions où se mêlaient l'incompréhension et la condamnation. Aujourd'hui, on n'en parle presque plus et l'agressivité est devenue une seconde nature, tant la vie humaine a énormément perdu de sa valeur. Les sociologues s'entendent pour expliquer cette violence urbaine par la banalisation de la mort devenue quotidienne lors de la terrible décennie noire vécue par les Algériens. Le terrorisme a, par les dizaines de milliers de victimes qu'il a faites, contribué à rendre la mort «normale» chez des petits malfrats de quartiers prompts à jouer du couteau surtout lorsqu'ils sont sous l'emprise de barbituriques. Mais il y a aussi un état d'esprit qui a fini par s'installer et qui a inscrit l'agressivité comme seul dialogue entre Algériens. Il n'y a qu'à voir comment de respectables pères de famille s'arment de crics pour se battre pour une simple affaire de priorité... On ne vit plus avec l'autre, mais contre lui. Et ce qui est paradoxal dans cette violence généralisée, c'est toute l'importance qu'a prise la religiosité dans notre société. Le vendredi à l'heure de la prière, les rues de toutes les villes se vident et ce sont de longues processions qui se dirigent vers la mosquée. A croire que cet instant de recueillement n'est que l'intermède à une configuration sociale, qui ressemble fort à une jungle. Enfin, de quoi je me mêle ? Khelli l'bir beghtah. Rabah Khazini