Positions «Le citoyen doit nous aider pour que notre entreprise continue à vivre.» C?est littéralement un SOS. Un appel à l?aide. Il émane des 177 employés non voyants de l?Entreprise publique pour l?intégration professionnelle et sociale des personnes handicapées (Epih) ex-Enabros, sise à la rue Saâd-Nacer à El- Harrach. Créée en 1953 par l?administration coloniale, elle était destinée dès le départ à la production de balais et pinceaux. L?entreprise a connu son apogée durant les années 1970-1980. A cette époque, elle jouissait d?un quasi-monopole sur le marché des balais en Algérie. Dès 1990, économie de marché oblige, l?entreprise subit de plein fouet les conséquences d?une concurrence sauvage de la part d?importateurs qui inondent le marché local d?une marchandise moins chère. Cumulant les manques à gagner, les problèmes ne tardent pas à apparaître. «Retard dans les salaires, compression du personnel et menace de fermeture. Depuis, notre avenir est incertain», dira un employé de l?entreprise. Sit-in, lettres ouvertes aux autorités concernées, les choses ne bougeront pas d?un iota. Le spectre de la fermeture continue de planer, rendant le quotidien des employés difficile. N?ayant plus les moyens d?assurer les salaires au-delà du mois de juin, l?inquiétude se lit sur tous les visages. La hantise de voir les responsables mettre la clé sous le paillasson ne vient, en fait, qu?envenimer une atmosphère déjà irrespirable. Bien avant, les travailleurs se plaignaient des salaires bas ? entre 8 000 et 15 000 DA ? et réclamaient des arriérés. Aujourd?hui, c?est carrément la fermeture qu?ils dénoncent. Pourtant durant l?année 2000, le ministre du Travail d?alors, Aboudjerra Soltani en l?occurrence, leur avait proposé la solution de la retraite anticipée. «Ce que nous avons refusé», dira un employé et ce par souci de préserver des postes d?emploi qui échoiront aux jeunes. En effet, une fois cette usine fermée, ce sont des chances d?emploi de moins pour les non-voyants, alors que cette catégorie est sérieusement touchée par le chômage. En effet, il ne se passe pas une journée sans qu?une vingtaine de jeunes vienne frapper à la porte de l?entreprise pour un éventuel poste. «Déçus, ils reviennent bredouilles sans que l?on puisse accéder à leur v?u.» Pis encore, l?entreprise souffre de la concurrence, le balai «made in» coûte entre 30 et 40 DA alors que le produit Epih est cédé à 62 DA ! Par souci d?économie, le client fait donc vite le choix. Un choix qui porte préjudice à l?Epih qui, ne pouvant plus écouler sa marchandise, se voit incapable d?honorer ses engagements. Face à cette menace réelle, les employés en appellent à une solidarité tous azimuts «puisque à chaque fois que le client opte pour nos produits, il aide à sauver l?entreprise et l?avenir des employés et de leurs enfants». Pour cela, une alternative : le retour du monopole Epih. Un v?u qui, malheureusement, reste au stade de rêve.