Etat des lieux - «Dans quelles conditions évolue la nouvelle génération du cinéma algérien ?», tel a été le thème de la conférence-débat organisée, hier, au forum culturel du journal El Moudjahid. Marquée par l'absence de jeunes cinéastes – tels Saïd Mehdaoui, Mounis Khemmar, Yanis Koussim, Yasmine Chouikh et Anis Djaâd – censés partager leurs expériences cinématographiques, la conférence a été animée par le seul jeune réalisateur Yahia Mouzahem connu par le public à travers sa série ‘Saâd El Gat'. Tout d'abord, Mouzahem brossera un tableau sinistre des conditions dans lesquelles évoluent les jeunes cinéastes. Venus d'horizons divers, ils manquent particulièrement de formation cinématographique. Motivés par la passion du cinéma, ils se lancent dans des aventures et expériences individuelles. Certaines ont eu un aboutissement prometteur, d'autres pas. Le jeune réalisateur insistera sur le fait que ses expériences ne contribuent pas réellement au renouvellement de la filmographie. Il a soutenu : «Notre génération essaye, tant bien que mal, de faire face à l'inertie que connaît le cinéma en Algérie. En réalité, ces initiatives individuelles ont le mérite de créer une certaine énergie sans pour autant créer un nouveau cinéma.» Par ailleurs, le conférencier a été très précis en situant le marasme du cinéma algérien. Sur ce fait, il est catégorique : «Il y a absence totale d'une industrie cinématographique, notamment en ce qui concerne le manque de financement des projets.» Et d'expliquer : «Chez nous, il y a un manque de confiance envers les jeunes cinéastes, c'est la raison pour laquelle ils ne bénéficient pas de financement. Alors ils se dirigent vers la réalisation de courts métrages ou de films à petit budget. Souvent ils sont contraints de les achever par leurs propres moyens. Une telle situation obligera les jeunes réalisateurs à s'orienter vers des activités qui leur assureront leur gagne-pain.» Evoquant dans ce sens son expérience personnelle, il avoue qu'après un échec cuisant dans la diffusion d'un de ses films dans les salles de cinéma, il s'est consacré à la télévision, avec la réalisation d'une série de comédies telle ‘Saâd el-Gat'. Une volonté de sa part de se rapprocher davantage du grand public. Ce dernier, ne fréquentant que très peu les salles de cinéma au demeurant peu nombreuses ou détournées de leur vocation première. Ce constat marque déjà à lui seul la faillite du cinéma. Malgré la réussite de Mouzahem à la télévision, il reste attaché à son rêve, celui de faire un grand film de spectacle, à grande production pouvant inciter le public à aller dans les salles. - L'autre problème auquel est confrontée la nouvelle génération du cinéma algérien, est «l'autocensure». Yahia Mouzahem assure que beaucoup de réalisateurs exercent l'autocensure sur leurs projets avant même de les soumettre aux commissions de lecture. Pour sa part, la censure ne lui fait nullement peur, il soutient que le cinéaste doit être doté de courage pour oser briser les tabous. «Je ferai de mon mieux pour briser les tabous, maux de notre société, tels que le célibat des femmes ou autres, c'est comme ça que nous arriverons enfin à nous débarrasser de nos complexes.» Il est vrai que la nouvelle génération du cinéma algérien peine à se faire une place dans l'univers du 7e art. Cependant, il y a lieu d'exprimer notre regret quant à l'absence des ces cinéastes à la rencontre d'hier. Comment est-il possible de convaincre les autres de nos préoccupations, s'ils ne jugent pas utile de faire le déplacement pour de telles rencontres ?