Création - C'est une nouvelle approche du théâtre que vient nous proposer le metteur en scène Ziani-Cherif Ayad, avec sa compagnie Gosto théâtre. Il nous invite à découvrir «l'autre théâtre», à travers sa nouvelle création ‘Aïn El Khobza 1', qui réunit trois pièces théâtrales dont la première est ‘Sidi Feltane' qui sera présentée dans la soirée du 28 mai, à l'auditorium du Palais de la culture. Lors d'une conférence de presse, hier, à la bibliothèque du Palais de la Culture, Ziani-Chérif Ayad s'est étalé sur le concept de «l'autre théâtre». «L'idée est de faire participer le public à la création artistique. Après 50 ans d'indépendance, notre théâtre connaît un niveau déplorable. Il a perdu son charisme et son aura. Nous avons peu d'auteurs, peu de connaisseurs en écriture théâtrale, ce que nous avons maintenant ce sont des représentations de scènes dialoguées», a-t-il dit. Le travail de la compagnie de Gosto Théâtre consiste à joindre la pédagogie à l'expression théâtrale. Il est convenu de s'inspirer des textes non dramatiques à l'origine, mais qui traitent du réel, de l'actualité immédiate pour réinventer un théâtre citoyen qui participe à la vie politique de la société. «Avec la complicité de l'équipe artistique nous avons décidé de partir de zéro. Sur la base de textes qui ne relèvent pas forcément de l'art dramatique, avec un débat avancé et un partage d'idées, nous arrivons à une autre étape pour construire la pièce. Cette démarche vient combler le vide qu'ont laissé nos écoles et nos universités, à savoir leur rôle d'inculquer aux jeunes l'esprit créatif et critique, comme c'était le cas par le passé», a-t-il expliqué. C'est de cette manière que sa nouvelle pièce ‘Aïn El Khobza1' a été montée. Les textes sont inspirés du livre ‘Le mythe en héritage' qui rassemble des chroniques de l'ancien ministre de la Culture Mohamed Abbou publiées dans le journal ‘Le quotidien d'Oran'. «Ce sont des chroniques qui parlent de la vie quotidienne. Cela m'a interpellé en tant qu'artiste qui vit et appartient à cette société. Je voulais parler de cette réalité et de ses contradictions, et me faire comprendre. Je veux être compris maintenant et non dans l'avenir», a-t-il souligné. Le texte fait état de la vie dans une République traversée par des événements politiques et culturels. Répartis sur trois tableaux : ‘Sidi Feltane' – en référence au saint de cette République – ‘Football', ‘Cinéma'. La pièce ‘Sidi Feltane' se jouera les 28, 29 et 30 mai au Palais de la culture. Notons, par ailleurs, qu'une table ronde autour «de la lecture publique à la représentation»,est prévue à la bibliothèque du Palais de la culture, le 3 juin. La compagnie Gosto Théâtre procédera à l'adaptation du texte ‘Sans voile, sans remords' de Leïla Aslaoui-Hemmadi, dont une table ronde est programmée pour le 5 juin prochain. «Je suis persona non grata» Cela fait près de dix années que Ziani-Cherif Ayad a quitté la direction du Théâtre national d'Alger, et c'est avec un pincement au cœur qu'il évoque «la dégradation du 4e art en Algérie». Un art qui, selon lui, aurait perdu son public. Le metteur en scène impute la responsabilité à l'absence d'une réelle politique culturelle. Il versera dans ce sens : «Le domaine de la culture manque de gestion professionnelle et d'objectivité, il fonctionne en raison des ministres et des individus, ce qui fait perdre la qualité des créations. Il n'y a pas de vision pédagogique pour former et éduquer le public. De nos jours, le public du théâtre se comporte de la même manière que le public des matches de football.» Interrogé sur des présentations hors de la capitale, Ziani-Cherif Ayad, d'un ton sec, répliquera : «Depuis quelques années, je suis une persona non grata. J'ai été taxé de ‘'hizb Frença'' alors que tout au long de ma carrière je n'ai fait que des adaptations de textes arabes et algériens, ce qui m'a coûté d'être exclu de nos théâtres. Le seul endroit où je suis autorisé à présenter mes créations, c'est au Palais de la culture. Depuis près de dix ans, je souffre de l'exclusion. Il est de mon droit, en tant qu'Algérien et créateur qui a permis à l'Algérie de remporter deux Grands prix à Carthage et de jouer ‘Nedjma' à la Comédie française – une première dans le monde arabe – de bénéficier des services des établissements culturels et d'exiger une ouverture de débats sur la gestion de nos théâtres.»