Aide - «Moi, c'est dans le four de ma cuisinière que je cuis mes gâteaux !», confia Hayat. Le ramadan tire à sa fin. Hayat jette un coup d'œil exténué sur l'horloge du couloir et constate qu'il est tout juste 14h. Elle se dit alors qu'elle dispose encore d'un peu de temps avant de s'attaquer sérieusement au travail quotidien qui l'attend dans la cuisine. Elle peut s'offrir une jolie petite sieste. Elle se réveillerait vers 15h 30 et se cloîtrerait comme d'habitude dans son «territoire» exigu qu'était sa cuisine. Au moment où elle va s'allonger sur son lit, la sonnette de la porte retentit. Elle ouvre et voit, debout sur le palier, sa voisine, Malika. — Ah ! Malika, quelle surprise ! s'exclame-t-elle joyeusement. Entre ! Entre ! Les deux mères de famille, âgées toutes les deux d'une trentaine d'années, s'entendent à merveille bien que Hayat soit femme au foyer et l'autre enseignante dans un lycée. Hayat ne cesse de dire à son amie qu'elle l'envie parce qu'elle est très instruite et celle-ci à chaque fois lui rétorque que si cela ne dépendait que d'elle, elle quitterait le lycée et resterait à la maison pour s'occuper de ses enfants et de son mari, qui, très souvent, se contentait de repas froids. Hayat est si généreuse qu'elle a failli alléger la peine de son amie la prof en acceptant de garder ses deux enfants en bas âge pendant qu'elle travaillait, mais Hocine, son mari, a refusé. «Ma maison ne deviendra jamais une crèche !», a-t-il décrété d'une voix qui étouffait dans l'œuf toute velléité de contestation. Les paroles de Hocine sont comme les balles d'un fusil quand la gâchette est actionnée : elles ne reviennent jamais en arrière ! Malika rend souvent visite à Hayat, mais la réciprocité est très rare. Après avoir discuté de tout et de rien, les deux femmes abordent le sujet des gâteaux qu'il fallait préparer en prévision de l'Aïd. — Cette année, soupire avec regret Malika, je ne ferai pas de gâteaux. Mon mari a vendu la voiture. — Je le sais, mais où est le rapport avec les gâteaux ? — D'habitude, c'est lui qui porte le plateau de gâteaux chez le boulanger qui se trouve à deux kilomètres d'ici. — Mais tu n'as pas besoin de boulanger pour cuire tes gâteaux. — Ah, bon ? — Mais bien sûr. Moi, c'est dans le four de ma cuisinière que je cuis mes gâteaux, confie Hayat. — Quelle chance ! Mais tu oublies que nous, nous n'avons pas encore acheté de cuisinière. Nous avons du mal à joindre les deux bouts. — Tu utilises toujours ta vieille tabouna ? — Hélas ! Oui... — Oh... pauvre voisine ! (A suivre...)