Alors que le ministre de l'Education affirmait, hier, depuis Koléa, que «les épreuves se déroulent le plus normalement», des scènes de colère, de vandalisme et autres crises d'hystérie ont éclaté dans plusieurs centres : l'épreuve de philosophie n'a pas été du goût des candidats, pour lesquels, les sujets proposés étaient hors programme. La colère s'est exprimée violemment par endroits. Dans certains centres d'examen de la capitale, «des candidats ont carrément recouru à des menaces à l'arme blanche pour obliger les surveillants à fermer les yeux pendant qu'ils trichent», nous dit un surveillant au seuil de la porte du Lycée Okba à Bab El-Oued. De graves incidents nous ont été également signalés au lycée du Caroubier et dans un centre d'examen à Bab-Ezzouar. On parle aussi d'une triche massive dans une dizaine de centres d'examen. Crises de nerfs, cris de détresse, hospitalisation sont les événements qui ont caractérisé cette troisième journée des épreuves du bac. Stress et appréhensions ont eu raison de plusieurs candidats, a-t-on constaté lors d'une virée à travers plusieurs centres d'examen d'Alger-Centre, Sidi M'hamed et Kouba. Des filières techniques, aux littéraires, la situation était la même. Des thèmes traités dans le programme scolaire, mais marginalisés dans la révision par les professeurs, ont totalement déboussolé les élèves. Au lycée Cheikh-Bouamama (ex-Descartes), quelques élèves, l'air dépité, nous expliquent qu'à cause du sujet d'aujourd'hui, ils ne peuvent plus espérer décrocher leur bac. Pour cause, les candidats de la filière lettres et philosophie ont eu droit à un sujet «inabordable», à en croire une candidate, qui passe pour la première fois son bac. «Notre professeur de philosophie nous a assurés que le thème de ‘'l'habitude'' ne sera pas traité au bac. Personne ne l'a révisé. J'ai essayé d'analyser dans tous les sens le texte, mais je sais que mes chances sont minimes. Le coefficient de la matière est 6», nous a-t-elle déclaré. Au lycée Rabah-Bitat des Bananiers à Bab-Ezzouar, les candidats de la filière scientifique étaient aussi mécontents. Approchés, un groupe de candidats nous a indiqué que «le sujet qui traitait de la génétique, n'a pas été enseigné durant cette année scolaire». Des incidents ont été également enregistrés dans d'autres wilayas pour les mêmes raisons. A Oran, des confrères de la radio locale nous signalent que des candidats au baccalauréat de deux centres d'examen ont menacé de boycotter les épreuves du troisième jour, avant d'y renoncer. «Leur colère a été motivée par la nature des questions qui portaient sur la partie du programme scolaire non concernée par ces épreuves. Autrement dit, les candidats ont été surpris par ces questions auxquelles ils ne se sont jamais préparés en raison des assurances du ministère qui a fixé le seuil du programme sujet à examen». Selon la même source, «Ils ont vivement exprimé leur colère et comptent saisir les instances concernées pour faire valoir leurs droits». Au niveau des lycées El-Othmania, Emir- Abdelkader et d'un autre lycée à Aïn El-Turck, dès la distribution des copies, des élèves ont commencé à manifester leur mécontentement, au moment où d'autres se sont évanouis. Mais c'est au niveau du lycée Ibn-Badis que la protestation des élèves a frôlé l'irréparable. Une élève a même tenté de mettre fin à ses jours en essayant de se jeter du premier étage. Un vent de panique a soufflé sur ce centre et tous les candidats ont quitté leurs places et se sont regroupés dans la cour. Certains élèves ont essayé d'entraîner leurs camarades à quitter carrément le centre et sortir manifester dehors. A Annaba, les candidats qui ont failli prendre des mesures radicales pour protester, disent, selon des confrères journalistes au niveau de cette wilaya, «être conscients des conséquences de leur acte. Mais ils estiment qu'il s'agit d'une dérive grave du ministère de l'Education qui n'a pas respecté ses engagements. A Tlemcen, les candidats, s'ils ont accepté de passer l'examen, «c'est parce que les surveillants leur ont permis de travailler en groupe et de s'entraider», affirme une source locale. Autrement dit, ils leur ont permis de tricher. - Au Technicum Ben-Touati de la ville de Chebli (Blida), «après un moment de perturbation, le calme est revenu au niveau de l'ensemble des classes. Les chargés du centre ont décidé une prolongation du temps imparti à l'épreuve de philosophie, afin de ne pas pénaliser le reste des élèves, sans procéder à l'expulsion des élèves à l'origine des troubles», a-t-on assuré de même source. «L'incident s'est produit lorsqu'un groupe d'élèves de la filières lettres et philosophie ont commencé à casser des chaises et des tables, dès qu'ils ont pris connaissance des sujets de philosophie, et ce, au motif que ces sujets n'ont pas figuré dans leur programme scolaire», a expliqué le chargé de l'information à la direction de l'éducation, M. Meftouh Mohamed. Le responsable du centre d'examen concerné a, également, signalé une tentative d'agression de surveillants par des candidats, ayant nécessité une intervention des services de sécurité, a ajouté la même source. Immédiatement après avoir été informée de la situation, la directrice du secteur éducatif de la wilaya, accompagnée d'une représentante du ministère de tutelle et du chef de la daïra de Boufarik, s'est déplacée sur les lieux, où ils ont entamé un dialogue avec les élèves pour les convaincre de reprendre leurs places et de terminer leur examen. Des cas de tricherie collective ont été, également, relevés lors de ces troubles, selon M. Meftouh, qui signale leur mention dans un rapport, dans «l'attente de la prise des décisions qui s'imposent», a-t-il dit. Par ailleurs, le secrétaire général de l'Office du bac, M. Aïssa-Amir Azzi, intervenant hier sur les ondes de la Chaîne 3 de la Radio nationale, a assuré que «les sujets de toutes les filières portent sur des leçons dispensées dans les lycées». - Des vidéos filmées par des candidats aux centres d'examen, l'une au CEM les frères Boudouara à Staoueli (ouest d'Alger), et en circulation sur You Tube montrent des scènes de copiage «en direct et collectives». Les surveillants, quant à eux n'ont rien pu faire face à une anarchie indescriptible au moment ou tous les candidats présents en classe partaient dans tous les sens. «Nous assistons à un scandale. Ceci n'est pas un bac», scandaient les candidats estimant que la faute incombe en premier lieu aux enseignants. Baba Ahmed : «Aucun dépassement...» «Les épreuves du baccalauréat, se déroulent dans de bonnes conditions à l'échelle nationale. Et aucun dépassement ou perturbation n'a été signalé». C'est la déclaration faite hier à Koléa par le ministre de l'Education nationale, Abdellatif Baba Ahmed, qui a assisté à l'ouverture des plis de l'épreuve de philosophie au centre d'examen, le lycée Khaled-Bousmaha. Il a eu une petite discussion avec des candidats auxquels il a donné des conseils pour ne pas se précipiter dans leurs réponses et de ne pas paniquer, les invitant à plus de concentration pour garantir de bons résultats. M. Baba Ahmed a assuré qu'aucun dépassement à ce jour n'a été constaté lors du déroulement des épreuves du baccalauréat et que toutes les questions étaient à la portée de tous. «Les épreuves du baccalauréat se déroulent dans de bonnes conditions à l'échelle nationale et aucun dépassement ou perturbation n'a été signalé» .