Résumé de la 66e partie - Au dîner, Christiane et le docteur se rendent compte que Marcelle pouvait être capable de sentiments délicats... «Marcelle amoureuse ? Tu es folle, chérie ! Elle en est incapable ! C'est un état d'âme qui ne l'a jamais effleurée... Elle ne sait pas ce qu'est l'Amour ! Elle ne cherche même pas à le savoir : ça ne l'intéresse pas ! Le seul sentiment qui est profondément enraciné en elle est celui du Devoir professionnel... C'est son Credo.» - «Peut-être as-tu raison, Denys ?» Lorsque je fus de retour chez moi, je constatai, en passant devant la chambre de mon assistante, qu'aucune lumière ne filtrait sous sa porte... Ce soir, pour la première fois depuis des mois, elle n'avait pas éprouvé le besoin de se replonger dans l'étude sur le cancer qu'elle m'avait dit préparer. Cela me fit réellement plaisir : la soirée qu'elle venait de passer en notre compagnie avait dû la détendre, lui permettre aussi de s'évader de sujets trop pénibles. Et je l'imaginai endormie, heureuse, souriante... Avant de me coucher moi-même je pensai «Ce n'est pas une mauvaise fille... Jusqu'à cette soirée, c'était plutôt une malheureuse sans famille, sans foyer, sans amis, qui n'attendait qu'un petit geste de notre part pour se rattacher à nous. Désormais, je me le promets, elle fera complètement partie de la maison comme Clémentine.» Le lendemain matin, je fus appelé d'urgence auprès de mon vieil ami, le père Heurteloup. Son état était grave. Le sachant irrémédiablement perdu, je laissai Marcelle auprès de lui pour lui donner les derniers soins et je téléphonai à un chirurgien du Mans pour le prier de venir d'urgence en consultation. Quand mon confrère arriva, le père Heurteloup était déjà dans le coma et il mourut trois jours plus tard sans qu'aucune intervention chirurgicale ait été possible. Il l'avait bien cherchée, cette fin, le brave père Heurteloup, avec ses innombrables «petits coups de calva» !... Marcelle, qui l'avait veillé jour et nuit avec un réel dévouement, rentra pour le déjeuner. Christiane était là. Je demandai aussitôt à mon assistante : — Répondez-moi franchement, Marcelle... Vous qui n'avez pas quitté le père Heurteloup pendant son agonie, de quoi croyez-vous qu'il est mort : de sa cirrhose du foie ou de sa tumeur rénale ? — Le foie n'a pas éclaté, docteur... C'est le cancer du rein qui a eu raison de sa solide constitution. — Ce serait donc le premier cas officiel que je diagnostique dans ma clientèle ? — II y en a eu certainement beaucoup d'autres, docteur, auxquels vous n'avez peut-être pas prêté attention. Ce sont de ces choses qui arrivent fréquemment en médecine courante : on se laisse hypnotiser, presque malgré soi, par les symptômes d'une affection secondaire alors que l'on néglige complètement le véritable mal... Souvenez-vous, docteur ! Vous-même n'avez eu la révélation de la tumeur rénale de M. Heurteloup que lorsque nous l'avons découverte ensemble sur les radiographies... (A suivre...)