Organisation Selon Me Benbraham, «les enfants, accompagnant ces jeunes femmes qui se livrent à la mendicité, sont souvent exploités par des réseaux organisés. On appelle cela des réseaux en grappe.» Elle explique : «Des jeunes, bien lotis financièrement, conduisant des voitures de luxe, sont les chefs de bandes. Ils exploitent les personnes âgées, les jeunes filles en détresse, les handicapés et les enfants.» Pour la constitution du réseau et son déploiement, «ils ciblent les villes, ils quadrillent les quartiers où le répondant de la mendicité est important». Me Benbraham signale, par ailleurs, que les chefs des réseaux maîtrisent parfaitement les textes juridiques. Reprenant la définition de la mendicité en matière de droit pénal, elle explique qu?elle consiste en «l?état d?une personne physique qui fait de la charité du public un moyen pour vivre». Cependant, relève-t-telle, «la spécificité de la personne qui dispose de moyens de subsistance ou qui est en mesure de se procurer un travail» n?est pas mentionnée, ce qui permet d?échapper à la définition. «C?est la première faille du texte.» Deuxième faille, «la loi 82-04 du 3 février 1982 évoque les sanctions contre les auteurs de la mendicité, d?où l?aberration, puisque les organisateurs des réseaux de mendicité échappent aux sanctions». Elle précisera que «l?article 195 du Code pénal fixe ces peines contre les auteurs de la mendicité de 1 à 6 mois d?emprisonnement. Pis encore, ces sanctions ne touchent que les personnes qui se livrent habituellement à la mendicité.» Pour échapper à ce caractère habituel, «les chefs opèrent des mouvements de rotation avec une surveillance accrue, d?une part et d?autre part, ces mouvements de rotation leur permettent de détecter les éventuels détournements d?une partie de la ??recette?? du jour». Pour garantir le silence des plus jeunes, les réseaux sont constitués «en grappe». A titre d?exemple, «un groupe d?enfants est chapeauté par un adolescent de 14 ans, le groupe d?adolescents, à son tour, est sous la coupe d?un jeune de 18 ans, et le groupe de plus de 18 ans est, lui aussi, sous la surveillance d?un de plus de 20 ans, etc. jusqu?au sommet», a expliqué Me Benbraham. «Dans le cas d?un détournement d?une partie de l?argent ou d?échec de l?enfant à en ramener beaucoup, il est puni par des brûlures à la cigarette sur les bras ou des brûlures par des lames de couteau chauffées», a-t-elle dénoncé. Le troisième élément qui arrange les chefs des réseaux concerne «l?article 196 bis du Code pénal qui ne permet plus l?emprisonnement des enfants, il ordonne les placements comme mesure en vue de leur protection». Les chefs exploitent cet article, d?autant que l?Etat est dans l?incapacité de protéger ces enfants qui se retrouvent aussitôt dans la rue. «Les chefs bénéficient ainsi de l?impunité totale», a-t-elle spécifié. Il faut savoir que cette pratique engendre des «recettes énormes». Selon le témoignage de Me Benbraham qui a assisté personnellement à l?écoulement de ces recettes dans un local de commerce, «pour la seule journée, le chef de bande a échangé pour une valeur d?un million de centimes de pièces de monnaie contre des billets». C?est dire que la mendicité est une activité porteuse, dont «le principal coupable est celui qui donne, car il ignore la loi et par la même occasion les souffrances de ceux qui sont exploités et exposés à la mendicité», déplore-t-elle. Et de conclure : «En fait, sans le vouloir ceux qui font la charité à ces gens-là grossissent les fortunes frauduleuses des organisateurs de réseaux.»