Direction - Plongée dans une profonde crise politique, la Tunisie s'apprête à suivre le chemin égyptien. Après les manifestations quotidiennes, ayant marqué le quotidien tunisien, durant le dernier mois, pour arracher la démission du gouvernement, l'opposition a prévu de multiplier ses actions de rue à Tunis et en province à compter du 24 août pour faire tomber le cabinet en place et le remplacer par un gouvernement de salut national. Ennahda a rejeté les demandes de ses détracteurs en proposant un cabinet de coalition élargie. Cette nouvelle action de rue est baptisée «semaine de la colère». Dans ce cadre, l'une des figures de l'hétéroclite coalition d'opposants, Hamma Hammami, a souligné hier mardi, lors d'une conférence de presse, que ce mouvement sera pacifique. «Nous n'avons appelé ni à la violence ni à l'effraction (dans des bâtiments publics), juste à des sit-in pacifiques afin de faire partir la coalition au pouvoir et les responsables désignés sur des bases partisanes et non de compétence», a-t-il souligné. «Le Front de salut national (la coalition d'opposition, ndlr) va poursuivre la campagne et s'il y a des violences ce sera de la part des autorités», a-t-il ajouté. Et pour contrecarrer une éventuelle prise de la rue par ses opposants, le Premier ministre tunisien, Ali Larayedh, a prévenu dans la même journée qu'il ne tolérerait aucune «atteinte» à l'Etat alors que l'opposition prépare une semaine de protestation pour pousser le gouvernement dirigé par les islamistes à la démission. «Ali Larayedh a dit qu'il n'y aura aucune hésitation ou recul face à ceux qui, par le terrorisme, l'anarchie ou la révolte, porteront atteinte aux institutions de l'Etat», a rapporté l'agence officielle TAP, précisant que le Premier ministre répondait à une question sur les manifestations que prépare l'opposition. La Tunisie est plongée dans une crise politique, depuis l'assassinat d'un opposant. La coalition de l'opposition réclame la mise en place d'un gouvernement de salut national, une revendication rejetée par le parti islamiste Ennahda. Les dirigeants tunisiens sont accusés d'avoir failli sur le plan sécuritaire face à l'essor de la mouvance jihadiste, mais aussi dans le domaine économique, alors que les revendications sociales étaient au cœur de la révolution de janvier 2011. Un premier gouvernement, dirigé par Ennahda, avait déjà été poussé à la démission après l'assassinat d'un autre opposant en février. Plusieurs responsables islamistes ont accusé l'opposition de s'inspirer du «modèle égyptien» où le président élu, l'islamiste Mohamed Morsi, a été renversé par l'armée, déclenchant une vague de protestation et de répression qui a fait des centaines de morts, essentiellement des partisans du chef de l'Etat déchu. Les islamistes au pouvoir et l'UGTT, puissant syndicat qui joue un rôle de médiateur, devraient se rencontrer pour des pourparlers alors que l'opposition appelle, à partir de samedi prochain, à une «semaine du départ» pour obtenir la démission du gouvernement en organisant des manifestations. Médias publics Des nominations contestées L'instance de l'audiovisuel tunisien a vivement critiqué hier, mardi, une série de nominations sans consultation à la tête de chaînes de radio publiques décidées par le gouvernement dirigé par les islamistes. Ainsi, la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (Haica) a appelé, dans un communiqué, les autorités à «revoir immédiatement les nominations (...) sur la base d'une méthode participative garantissant l'indépendance des médias». Le gouvernement, dirigé par les islamistes d'Ennahda, qui sont régulièrement accusés de vouloir contrôler la ligne éditoriale des médias publics, a annoncé la semaine dernière la nomination de nouvelles directions à la tête de cinq radios. Contrairement aux dispositions prévues dans un décret adopté à la suite de la révolution de 2011, la Haica a indiqué ne pas avoir été consultée. L'instance a aussi dénoncé les méthodes de Mohamed Meddeb, directeur général de la Radio tunisienne, qui regroupe neuf chaînes, l'accusant de «s'ingérer dans le travail rédactionnel». Selon la Haica, il a notamment ordonné «de ne pas diffuser d'informations susceptibles de troubler l'ordre public et la paix sociale».