Les dirigeants tunisiens ont entamé, avant-hier, des consultations avec l'opposition et de la société civile dans l'espoir de résoudre la crise politique déclenchée par un nouvel assassinat d'opposant. Les partisans et les détracteurs du gouvernement continuent en outre d'appeler à descendre chaque nuit dans la rue, après la rupture du jeûne du Ramadan, en particulier devant l'Assemblée nationale constituante (ANC), dans la banlieue de Tunis. Le président Moncef Marzouki, un laïc allié aux islamistes d'Ennahda qui dirigent le gouvernement, a reçu les responsables de plusieurs partis réclamant le départ de la coalition au pouvoir et qui ont présenté leurs solutions faute d'un front uni des opposants. Maya Jribi, du Parti républicain qui veut la dissolution de l'ANC, a milité pour un cabinet de salut national dirigé par un indépendant et composé de ministres qui ne se présenteront pas aux prochaines élections. Mohamed Hamdi, de l'Alliance démocratique, a demandé un gouvernement de compétences assisté par une instance composée de différents partis politiques. Il a plaidé pour que l'ANC soit maintenue mais qu'elle achève ses travaux, en particulier la rédaction de la Constitution qui est dans l'impasse, avant le 23 octobre. En outre, le Premier ministre islamiste Ali Larayedh a reçu le secrétaire général du puissant syndicat UGTT, Houcine Abassi, dont l'organisation réclame la formation d'un gouvernement de technocrates. Aucun des deux hommes n'a fait de déclaration à l'issue de la rencontre. La réunion a été longue pour évaluer la situation actuelle et les solutions pour sortir de la crise et pour la lutte contre le terrorisme, a simplement indiqué le ministre des Affaires sociales Khalil Zaouia. M. Larayedh, soutenu par son parti islamiste Ennahda, a exclu cette semaine toute démission et a proposé comme sortie de crise de nouvelles élections le 17 décembre, une fois la Constitution adoptée. Cependant, le projet de Loi fondamentale ne fait pas consensus et une soixantaine de députés réclament la dissolution de l'ANC. Si les dissensions existent parmi les opposants, elles sont tout aussi importantes au sein du gouvernement: Ettaktol, un membre de la coalition, est favorable à une dissolution du cabinet et deux ministres, dont celui de l'Intérieur, ont réclamé un changement d'équipe à la tête du pays. Dans la nuit de mercredi à jeudi, plusieurs milliers de partisans et de détracteurs du gouvernement ont encore participé à des rassemblements. En outre, le parti islamiste Ennahda a aussi appelé à un vaste rassemblement samedi soir place de la Kasbah, où se trouve le siège du gouvernement, pour la légitimité et le maintien des institutions de l'Etat et pour dénoncer la violence et le terrorisme. La Tunisie est plongée dans cette crise depuis l'assassinat le 25 juillet du député nationaliste de gauche Mohamed Brahmi, attribué à la mouvance jihadiste. Les tensions et différends ont ensuite été exacerbés après la mort lundi de huit militaires dans une embuscade commise, selon le pouvoir, par un groupe terroriste islamiste. Les autorités tunisiennes ont aussi fait état d'un attentat manqué dans la nuit de mardi à mercredi contre une patrouille de la gendarmerie. Cette série d'attaques n'a pas été revendiquée, alors que le gouvernement a admis au printemps que des cellules d'Al-Qaïda étaient actives en Tunisie.