En Colombie, l?assassinat en 1948 d?Eliecer Gaitan, leader libéral qui a tenté de mobiliser les classes populaires contre l?oligarchie, marque le début d?une guerre civile ? la Violencia ? qui fera plus de 300 000 morts. Face à la violence conservatrice, des guérillas libérales et communistes font leur apparition. Tandis que les groupes armés libéraux déposent les armes, le Parti communiste colombien préconise une politique d?autodéfense de masses. Des zones d?autodéfense paysannes ? dont la mythique «République indépendante de Marquatalia» ? se développent, durement réprimées par l?armée qu?assistent les Etats-Unis. S?appuyant sur les rescapés de ces premières guérillas, le Xe Congrès du PCC propose de restructurer un appareil armé révolutionnaire en formant, en 1964, les Farc (Forces armées révolutionnaires de Colombie). Sous l?impulsion de Jacobo Arenas et surtout Manuel Marulanda (Tirofijo), celles-ci s?implantent dans huit provinces du pays. En 1966, le mouvement est rebaptisé Forces armées révolutionnaires de Colombie-Armée du peuple (Farc-EP). Depuis les années 1980, une partie de leur financement provient d?un impôt prélevé sur la coca, auquel s?ajoutera une politique d?enlèvements contre rançon (dite «retenue à la source»). Présents dans plus de 40% des communes colombiennes, les combattants des Farc-EP opèrent sur soixante fronts d?au minimum cent combattants chacun. Inspirée par l?exemple de la Révolution cubaine, l?Armée de libération nationale (ELN) commence, pour sa part, à opérer en 1965. C?est dans ses rangs que meurt au combat, en février 1966, le prêtre guérillero, Camilo Torres. Son destin prend valeur de symbole pour tous les chrétiens «engagés» du continent. Jusqu?en 1999, l?ELN sera dirigée par un prêtre espagnol, Manuel Pérez. L?ELN trouve le gros de son financement dans «l?impôt de guerre» auquel elle assujettit les compagnies pétrolières. Elle pratique également l?enlèvement contre rançon. Ses effectifs sont estimés à 5 000 combattants. En 1967, et avec le conflit sino-soviétique, a surgi l?Armée populaire de libération (EPL), maoïste, branche armée du groupusculaire Parti communiste marxiste-léniniste. A ces guérillas s?est ajouté le M19, créé en 1970 pour protester contre la fraude électorale qui prive alors le général populiste Gustavo Rojas Pinilla de sa victoire à l?élection présidentielle. Issu de la bourgeoisie urbaine, loin des idéologies marxistes léninistes, le mouvement se fait connaître en février 1980 par la prise de l?ambassade dominicaine, où sont gardés en otages de nombreux diplomates. Il va par la suite progressivement se radicaliser. Les paramilitaires sont nés, quant à eux, à la fin des années 1960, dans le cadre d?une politique recommandée par les conseillers américains pour «casser» toute velléité de transformation sociale. Bras armé des narcotrafiquants à partir de 1985, supplétifs de l?armée pour mener la «guerre sale» contre les bases sociales de la guérilla, regroupés depuis avril 1997 au sein des Autodéfenses unies de Colombie (AUC), ils tentent d?habiller leur stratégie contre-insurrectionnelle d?un discours politique, de façon à paraître autonomes de l?armée et des pouvoirs d?Etat.