Résumé de la 119e partie - Marcelle s'apprête à procéder avec Christiane de la même façon qu'avec Mme Boitard... Ces simples mots écrits pour Christiane : «Elle est venue...» résument tout ! Je m'imagine mon assistante prenant un air entendu pour dire d'une voix doucereuse et docte à ma pauvre Christiane, déjà tremblante derrière la glace-écran : - «C'est très curieux... Le voile clair n'est visible sur aucun poumon alors qu'il y a une tache noire très nette à gauche...» Contrairement à ce qu'elle disait, elle voyait très bien, la misérable, le voile qui faisait apparaître, derrière la glace-écran, le poumon gauche plus gris que le poumon droit : c'était la preuve certaine de l'affection tuberculeuse, mais elle se garda bien d'en souffler mot. Elle appliquait la redoutable méthode qui consiste à orienter toute l'attention et les soins sur une fausse maladie pour permettre au vrai mal de se développer à son aise. La tache noire, dont elle parlait avec complaisance, était purement imaginaire, car elle n'existait pas et n'existera, j'espère, jamais chez Christiane : c'est la marque caractéristique du cancer du poumon.., un bloc noir et arrondi. Mais comment mon pauvre amour, ou n'importe qui à sa place, aurait-il pu se douter de l'odieuse supercherie ? Tout cela fut d'une habileté diabolique. Marcelle dut ajouter, singeant en cela le professeur Berthet lorsqu'il lui avait fait subir son propre examen à Villejuif : - «Il me paraît plus prudent de faire deux ou trois radiographies. Je développerai les plaques aussitôt après votre départ et avant que le docteur ne revienne. Dès demain matin je commencerai ma tournée par une visite au château : je vous dirai exactement ce qu'il en est... Mais surtout ne vous inquiétez pas ! Le pire dans votre cas est l'agitation...» Quand elle reconduisit ma pauvre Christiane jusqu'à la voiture, elle savait très bien que ces premières paroles, lancées le plus naturellement du monde, produiraient leur effet mathématique, comme cela se passe pour tous les malades réels ou imaginaires. Ne l'a-t-elle pas reconnu, Marcelle Davois, lorsqu'elle a écrit : «Quand elle est repartie pour le château deux heures plus tard, Christiane n'était plus la même...» Le poison moral était entré en elle. On sent une véritable délectation dans ce qu'écrivit le lendemain soir la criminelle : de ces taches au bas du poumon gauche...» - «En effet, constata Christiane. Qu'est-ce que vous en pensez ?» Je pris un air de plus en plus soucieux, dans lequel une retenue voulue semblait vouloir cacher quelque chose - «Je ne puis pas encore vous dire, ma petite Christiane, le fond de ma pensée, mais je vous promets de vous révéler prochainement la vérité... Je vous la dois pour deux raisons : d'abord parce que j'ai pour vous une sincère affection et que j'estime que l'on n'a pas le droit de mentir à de véritables amis... (A suivre...)