Résumé de la 104e partie n Le plan de Marcelle était lumineux de clarté et de précision. Nous l'écoutâmes, Christiane et moi, pendant deux heures. Le comité proprement dit serait composé de six membres : le chanoine Lefèvre; maître Boitard le notaire ; Mme Fayet, épouse du directeur de l'Enregistrement, qui ne nous aurait pas pardonné de ne pas l'avoir sollicitée - elle qui aimait tant les maladies et les médicaments ! - et dont nous nous serions fait une ennemie irréductible si nous l'avions laissée au-dehors... c'est qu'elle avait une langue de vipère, la brave Mme Fayet ! Pour le quatrième membre, nous hésitâmes. Christiane avait lancé le nom du lieutenant Deval, mais il nous sembla, à Marcelle et à moi, qu'il était difficile de demander au représentant des Eaux et Forêts de siéger dans le même comité que maître Boitard ! Finalement, notre choix se fixa sur M. Marchand, le directeur de l'école communale : décision adroite contrebalançant l'influence de l'archiprêtre, qui était son ennemi irréductible. II ne fallait pas que ce Comité prît une allure confessionnelle : ses membres devaient venir de tous les horizons sociaux et politiques dans le seul but de lutter contre un fléau commun. La même raison nous mit tous trois d'accord pour que le cinquième membre fût un modeste artisan de la ville et de préférence un simple ouvrier. Le sixième enfin devait être un paysan évolué désireux de s'intéresser à un problème aussi angoissant. Plusieurs noms furent jetés... Perrin, le charpentier ? Un peu trop bavard... Bernier, l'électricien ? Ce ne serait pas mal : un garçon intelligent... Jacquard, le secrétaire de la coopérative agricole ? Trop paniquard... Servais, l'horticulteur ? Excellente idée... Finalement, il fut décidé que Bernier représenterait l'élément ouvrier et Servais la paysannerie. Le comité était déjà constitué sur le papier. Il était préférable que je n'en fisse pas partie pour conserver, en toute indépendance, ma position de médecin qui doit orienter les débats, et servir de lien indispensable avec les organismes officiels, spécialisés depuis longtemps dans la lutte, tels que l'Institut Pasteur ou celui de Villejuif. Marcelle remplirait à la perfection les fonctions modestes, mais indispensables, de secrétaire générale. Il était très tard quand je reconduisis Christiane au château. Elle me dit en me quittant - «Chéri, je suis très heureuse que ce comité prenne corps, mais je me demande honnêtement si je suis bien digne de le présider.» - «Il n'y a que toi, Christiane, à pouvoir occuper ce poste... Toi, ma future femme !... et je sais que ce problème du cancer te passionne. Avoue-le.» Elle ne répondit pas. Ça la passionnait, en effet. Ça la torturait même depuis que Marcelle l'avait «initiée» à mon insu... Depuis surtout ce que j'ignorais ! - qu'elle lisait avidement toutes les brochures et revues médicales dans lesquelles le problème était, sinon traité, du moins exposé... brochures que mon assistante lui passait régulièrement en cachette. Le poison moral était déjà en Christiane. Marcelle Davois le savait... «Ce 13 septembre. - J'ai eu peur... très peur quand Denys m'a dit qu'il avait été voir Berthet ! Je n'aurais plus eu qu'à m'enfuir si mon ancien patron avait révélé mon état de santé réel ! A suivre Guy des Cars