«Donner la falaqa» a pris, aujourd'hui, le sens de «frapper, punir». Si le mot falaqa comporte, effectivement, l'idée de punition, il désigne, au sens propre, un type particulier de punition, la bastonnade, que les maîtres d'écoles coraniques administraient autrefois aux enfants. Ce type de châtiment n'était pas propre à l'Algérie et se retrouvait dans tout le monde musulman et même en dehors, puisqu'il était aussi pratiqué dans des pays comme la Grèce. D?ailleurs, certains auteurs donnent une étymologie grecque au mot falaqa ; en fait, il s?agit, dans cette langue, d?un emprunt fait au turc et, à partir du grec, le mot s'est répandu dans les pays balkaniques. Le mot falaqa est attesté dans les sources musulmanes dès le Xe siècle de l'ère chrétienne, alors que dans les langues européennes, il ne remonte pas au-delà de la période turque. Mais en quoi consistait ce châtiment ? Il s'agit d'une bastonnade donnée sur la plante des pieds par le maître d?école, assisté par une ou plusieurs personnes qui immobilisaient les pieds du supplicié avec un instrument appelé justement falaqa et, plus rarement, mitraqa (matraque). Cet instrument se présentait généralement sous la forme d'une planche percée de deux trous dans lesquels on introduisait les pieds. Parfois, il s?agissait de deux bâtons que l'on reliait aux deux bouts et qui servaient à serrer les chevilles. Parfois encore, on utilisait un seul bâton avec une corde attachée aux deux bouts : on passait les pieds entre le bâton et la corde et on tournait le bâton. Les pieds immobilisés étaient livrés au bourreau qui pouvait passer à l'acte. Le nombre de coups était proportionnel à la faute commise ; il y avait aussi des degrés dans l?intensité des coups. On a rapproché le mot falaqa du verbe falaq (faire éclater, fendre) mais les lexicographes donnent «khachaba» (pièce de bois taillée). L'instrument et le supplice ont, fort heureusement, disparu de nos écoles, mais le mot, lui, est resté !