Itinéraire - «Quand la barbarie se répandait, décimant les siens, cet homme répandit l'humanité, la compassion et le droit». Produit par l'AARC (Agence algérienne pour le rayonnement culturel), avec le soutien du ministère de la Culture, le film documentaire Abdelkader de Salem Brahimi a été projeté, hier, en avant-première, à la salle Ibn Zeydoun (Office de Riyad el-Feth). Dans ce film d'une durée de 96 minutes, le réalisateur, Salem Brahimi, également coscénariste avec Audrey Brasseur, fait toute la lumière sur cet homme considéré à la fois comme résistant aux armées coloniales et porteur d'un immense savoir. «Quand la barbarie se répandait, décimant les siens, cet homme répandit l'humanité, la compassion et le droit». Le film, qui retrace donc le parcours tant politique que spirituel de l'Emir Abdelkader, et ce, depuis son enfance jusqu'à son emprisonnement et son exil, commence d'abord par un micro-trottoir, afin de voir si l'Algérien sait bien qui était l'Emir Abdelkader. C'est la voix off d'Amazigh Kateb qui ouvre le film. Devenu pour l'occasion «goual» ou conteur, Amazigh Kateb vient à chaque fois ponctuer les étapes importantes du film. Ainsi, dans un arabe dialectal – un parler qui nous rappelle le théâtre oral populaire de son père –, ce documentaire se présente en quelque sorte comme un conte narré, un conte illustré par une multitude de photos d'archives et rehaussé par des images d'animation en ombres chinoises, une manière artistique de compenser l'absence d'images d'époque. A cela s'ajoutent des témoignages. Il est aussi accompagné musicalement par la bande son de Mehdi Haddab, le célèbre joueur de 'oud électronique alliant dans sa gamme le souffle de la tradition arabe aux temps modernes. Plus tard, après avoir évoqué l'enfance et l'éducation religieuse de l'Emir ainsi que son pèlerinage à La Mecque en compagnie de son père, le film évoque les principales étapes de la vie et du combat de l'Emir depuis la «Moubayaâ», à savoir l'allégeance en 1832 jusqu'à sa reddition, en 1847, en passant par ses efforts pour unifier les puissances tribales, la fondation des lignes de citadelles comme Tagdempt (Tiaret) et la création, après la destruction de ces villes par l'armée coloniale française, de la «Smala», sa capitale itinérante. Pour étayer tout cela, le film s'appuie sur des témoignages d'historiens et spécialistes algériens et étrangers comme Chamil Boutaleb président de la Fondation Emir-Abdelkader, Kaddour M'hamsadji, Mustapha Khyati, Michèle Levallois et Stani Combo qui a analysé la structure architecturale de la Smala. Le film évoque également le séjour carcéral de l'Emir et de la centaine de personnes qui l'accompagnaient dans les différentes geôles françaises, son exil, d'abord à Brousse, en Turquie, puis à Damas en Syrie où il séjournera jusqu'à sa mort. Par ailleurs, le film nous emmènera jusqu'aux USA à la découverte ou redécouverte d'une ville entière portant le nom d'Abdelkader, en hommage à sa résistance à l'occupation coloniale française. Tout au long du film, les témoignages d'historiens et universitaires s'accordent à soutenir que l'Emir Abdelkader, celui qui a œuvré au rapprochement entre Orient et Occident et pour le dialogue interreligieux, est considéré comme «l'un des fondateurs des droits humains ayant inspiré la Convention de Genève sur le traitement des prisonniers de guerre».