Résumé de la 109e partie ■ Le concert fut fini, Chantal remonta l'escalier de sa maison : ses oreilles bourdonnaient encore et elle se demandait si elle n'avait pas rêvé... Là, son rêve s'agrandit, prit des proportions fantastiques : sur la table, au milieu du salon, une lettre était déposée bien en évidence. L'enveloppe portait l'indication «Air Mail», l'écriture était celle de Mme Royer. Chantal chancela et dut s'appuyer à la table pour prendre la missive d'une main tremblante : c'était la première qu'elle recevait, deux mois après son départ, la première qui lui apportait enfin des nouvelles de ce qui appartenait déjà pour elle au passé... La nuit était complètement tombée quand elle relut pour la cinquième fois la longue lettre écrite sur papier pelure, par la directrice de «Marcelle et Arnaud». Fred ne viendrait pas faire sa lecture quotidienne : la veille, il avait prévenu son auditrice qu'il serait retenu à un dîner officiel à bord du yacht du Gouverneur. Chantal apercevait le navire illuminé, tranchant sur le noir de la rade et dont la vision ravivait le souvenir passionné des soirées de l'Empress of Australia en compagnie de Robert. Elle était contente que le jeune medecin américain ne fût pas auprès d'elle ce soir : jamais elle n'aurait pu écouter sa lecture, ayant à lire et à relire elle-même quelque chose qui était plus vrai que n'importe quel livre ! La prose de Mme Royer n'avait rien du roman. Le seul reproche qu'elle pouvait faire à cette lettre était de contenir un passage beaucoup trop long, consacré au chagrin de Jacques. Il aurait bien fallu que Chantal le quittât un jour ou l'autre... N'avait-il pas eu sa part de bonheur pendant quatre années ? Quatre années, ça compte quand on a largement dépassé la soixantaine ! Chantal regarda la date de l'expédition grâce à l'avion, ces nouvelles avaient à peine cinq jours. L'avion devait faire escale à Suva où le bateau blanc du Gouverneur avait reçu le courrier destiné à Makogaï. Le bateau repartirait dès demain pour Suva il fallait donc lui apporter la réponse dès le lever du jour pour que celle-ci profitât du prochain avion à déstination de l'Europe. Chantal devait écrire sa lettre immédiatement ! Mais elle n'avait ni encre, ni plume, ni papier pelure pour avion, dans cette maison perdue... La seule solution était de courir jusqu'à la demeure la plus proche, celle du Révérend David Hall, pour lui demander qu'il prêtât l'encre, la plume, le papier ? Il possédait certainement ces trésors inestimables.En arrivant devant la maison du pasteur, elle fut prise d'inquiétude : le Révérend David Hall et sa famille devaient assister au dîner de gala offert sur le bateau du Gouverneur ? Tous les stores étaient baissés, aucune lumière ne filtrait... Chantal appela en vain. Au moment où elle allait repartir, désespérée, une voix calme parla dans son dos : — Vous veniez me voir ? Donc j'ai bien fait de rentrer. (A suivre...)