Résumé de la 10e partie ■ Mon tonneau vaut peut-être plus que tu ne crois. Mettons-le d'abord à l'épreuve : d'une main tremblante, il frappa dessus avec la baguette d'argent. Aussitôt le baril s'ouvrit en deux parties comme une armoire... Jean-Pierre but trois fois à la santé de M. le Vent, et, comme le vin était capiteux, le meunier se coucha, la tête un peu troublée ; il s'endormit et ronfla comme un chantre. Claudine se coucha aussi ; mais elle ne fit que s'agiter dans le lit sans pouvoir dormir, tant elle avait hâte de voir le jour, pour aller conter cette aventure à sa voisine la laitière. La voisine ouvrit de grands yeux en écoutant cette histoire. Elle répéta plusieurs fois, en soupirant, que Claudine était bien heureuse d'être l'amie de M. le Vent, et de posséder le précieux baril d'argent. Aussitôt la meunière partie, la laitière mit son panier sur sa tête, et s'en alla porter de la crème et du beurre au château. Elle ne manqua pas de raconter l'aventure de sa voisine au cuisinier. Le cuisinier raconta la nouvelle au valet de chambre, et le valet de chambre, tout en aidant son maître à s'habiller, lui apprit ce qui était arrivé à Jean-Pierre. Le baron conçut tout de suite le projet de s'emparer du petit tonneau d'argent ; c'est pourquoi il monta sur son cheval et s'en alla au moulin. Lorsque M. le baron arriva au moulin, Jean-Pierre venait de se lever, et Claudine n'était pas encore revenue, car, en sortant de chez la laitière, elle avait couru raconter son aventure à sa voisine la blanchisseuse, à sa commère la bûcheronne, et à sa cousine la gardeuse de vaches. —Jean-Pierre, dit le baron, M. le Vent, qui est de mes amis, m'a dit ce matin qu'il t'avait donné un petit tonneau d'argent dans lequel il y a une cuisine magique. Qu'as-tu besoin de manger des dindons rôtis dans une cabane délabrée, avec des habits percés et des meubles vermoulus ? Il vaudrait mieux faire raccommoder ta masure par le maçon et le charpentier, acheter des habits bien chauds, des robes pour ta femme, et des armoires, du linge, des fauteuils pour meubler ta chaumière. Vends-moi ta petite cuisine. Je te donnerai dix mille livres, avec lesquelles tu pourras bâtir une autre maison, acquérir des champs, des bestiaux et des chevaux, et tu deviendras un riche propriétaire. —Monsieur le baron, répondit le meunier, quand j'aurai dépensé mes dix milles livres, il ne me restera plus rien, tandis qu'avec mon petit tonneau, j'ai ma nourriture assurée pour toute la vie. — Comment ! reprit le seigneur, n'est-ce rien que de posséder une bonne maison et de cultiver les champs ? —C'est la vérité, dit Jean-Pierre ; des terres d'un bon produit valent mieux que des poulets rôtis. D'ailleurs, ma femme m'a grondé de n'avoir pas demandé à M. le Vent dix mille livres, et, puisque vous m'offrez cette somme, j'accepte le marché. (A suivre...)