Résumé de la 22e partie ■ Je n'oublierai pas ta belle action. Pierrot embrassa Marguerite sur les deux joues et en lui rendant son baiser, elle lui dit : «Si la sainte Vierge écoute mes prières, tu seras un jour mon Jasmin et je serai ton Eglantine.» Le lendemain, Mme la baronne vint à la ferme. Elle embrassa aussitôt Pierrot et lui donna une boîte remplie d'outils de charpentier, avec une douzaine de livres reliés en maroquin, parmi lesquels étaient des ouvrages de géométrie, une histoire ancienne et une de France, depuis Pharamond jusqu'au roi Robert. Elle remit ensuite à Claudine une bourse bien garnie, en lui disant d'employer cet argent à faire instruire son fils. Pierrot, pénétré de reconnaissance, ouvrit les livres après le départ de la baronne et se dépêcha d'étudier, afin d'être bientôt aussi savant qu'il était courageux. Au bout de six mois, il savait par cœur tout ce qui était dans ses livres ; la baronne lui en donna d'autres qu'il lut assidûment. Il fut bientôt capable d'en remontrer au magister du village, et tous les soirs, avant de s'endormir, il ajouta cette petite phrase à ses prières : «Saint Pierre, mon patron, priez la sainte Vierge d'exaucer les vœux de l'aimable Marguerite, faites qu'un jour je sois son chevalier Jasmin et qu'elle devienne mon Eglantine.» Un soir, Jean-Pierre et sa femme étaient assis paisiblement au coin de leur feu dans une chambre bien close. Les volets étaient fermés et les fenêtres recouvertes de tapisseries. Il y avait double porte à la chambre et double porte à l'antichambre ; aussi ne sentait-on pas le moindre courant d'air. Le meunier et sa femme se réjouissaient des bontés de Mme la baronne et ils goûtaient leur aisance avec d'autant plus de plaisir qu'on entendait le vent mugir au dehors. Les petits esprits ne trouvaient pas le moindre trou pour s'introduire dans la ferme. Cependant, à force de prêter l'oreille, Claudine crut distinguer leurs voix : «Ingrat Jean-Pierre, disaient-ils, tu nous dois tout et tu nous refuses un asile. Plus de carreaux cassés, plus de crevasses où nous puissions gémir et bourdonner ! C'est à peine si l'on peut siffloter par le trou de la serrure, tout doucement.» «Est-ce que M. le Vent voudrait encore une fois entrer chez nous ? s'écria Jean-Pierre un peu effrayé.» «Il n'y aurait pas grand mal à cela, dit Claudine. Si l'envie lui en prend, laissons-le faire. Peut-être nous en trouverons-nous aussi bien que la première fois.» En parlant ainsi, Claudine ouvrit toutes les portes. Au même instant, M. le Vent parut et s'élança dans la chambre en tournoyant. La queue de son manteau s'enlevait jusqu'au plafond et ses deux grandes ailes remplissaient la moitié de l'appartement. «Oh ! dit-il avec sa grosse voix, il y a du changement ici. Tu as donc fait fortune, malgré tes sottises, maître Jean-Pierre ?» (A suivre...)