Hantise Le risque d?épidémie menace la population locale dans une ville qui croule sous les ordures. La plupart des cités d?Oran sont sales et repoussantes ; les détritus jonchent les rues et les moustiques redoublent d?ardeur. Les relents pestilentiels exhalés par les immondices et autres ordures ménagères entreposées devant les immeubles offrent une image peu flatteuse d?El-Bahia, un terme galvaudé alors que la ville croule littéralement sous les ordures. Depuis l?Indépendance, aucune solution n?a été trouvée pour remédier à cette situation. Les innombrables responsables qui se sont succédé à la tête des services de la voirie ont tous échoué dans leur mission de débarrasser la ville de ses ordures. Un petit tour dans les quartiers périphériques et du centre-ville suffit pour se faire une idée de ce qu?est la notion d?hygiène à Oran. Pour simplifier les choses, des responsables illuminés ont eu l?ingénieuse idée de «construire» un dépôt à ordures béant dans chaque cité. Résultat : les citoyens subissent les mauvaises odeurs, les rongeurs y trouvent un terrain de prédilection et les moustiques un foyer de reproduction par excellence. «A-t-on idée d?amonceler des tonnes d?ordures dans les cités sans tenir compte d?aucune programmation pour leur collecte ?», s?indignent des citoyens au bord de la déprime. En effet, faute de stratégie pour la collecte des ordures ménagères, les responsables de la commune se sont rabattus sur le travail simpliste qui sied bien à leur état d?esprit étriqué. Pourquoi ne pas revenir à l?ancien système de collecte qu?effectuaient, chaque matin, des ouvriers qualifiés avant même le départ des enfants pour l?école ? Cette pratique souple et économique de collecte des ordures a été abandonnée dans les années 1970 sans explication des responsables locaux qui se rejettent la balle devant l?accroissement des ordures et la multiplication des épidémies. «Oran court le danger d?être complètement submergée par les détritus si rien n?est entrepris dans l?immédiat pour pallier cet état de fait délétère», avertit un spécialiste de l?environnement. Selon lui, outre les relents nauséabonds et l?amoncellement des ordures, la propagation des maladies pathologiques comme le choléra ou la méningite risquent de mettre à mal une population déjà éprouvée par ces maladies endémiques. En effet, des maladies pathologiques tels l?eczéma, la gale ou le trachome sont «discrètement» signalés par certains services infectieux qui ne veulent pas aller au fond des choses. «Il est pratiquement impossible de continuer dans cette voie. Il faut que les responsables trouvent au plus vite un système de collecte systématique et coordonné qui prévienne les citoyens contre les mauvaises surprises», avertit pour sa part ce médecin épidémiologiste. Le même constat est relevé aux alentours immédiats des édifices publics et de certains sites archéologiques à l?exemple du séculier Kasr El-Bey qui s?est transformé en dépotoir à ciel ouvert. Près de certaines écoles de la cité Grande-Terre, des dépotoirs ont été improvisés, mettant en danger la santé des petits écoliers et des habitants. Quand on pénètre dans cette cité jadis coquette, une odeur âcre vous agresse les narines. L?atmosphère est irrespirable et il faut presser le pas pour éviter les relents et les piqûres de moustiques. «En hiver comme en été, nos fenêtres demeurent hermétiquement fermées. On supporte difficilement la chaleur l?été et l?humidité l?hiver, mais nous ne pouvons tolérer les mauvaises odeurs et le ballet incessant des moustiques», clament des citoyens. A cela vient s?ajouter l?inexistence de campagnes de démoustication et de dératisation qui ont disparu à jamais des pratiques citadines.