Destinée Abdelkader Haouès est âgé de 51 ans. Autrefois marin pêcheur, il a aujourd?hui changé de métier. Ce poissonnier, rencontré à l?extérieur de la pêcherie, évoque son passé de marin pêcheur et son présent de poissonnier. Appartenant à une autre génération, il n?a pas la même conception du métier, bien qu?il soit issu d?une famille de pêcheurs. Trois de ses frères continuent à exercer ce métier. D?ailleurs, ils sont ses fournisseurs en poissons pour sa table près de la pêcherie et pour son restaurant Sable d?or, situé juste en face, de l?autre côté de la route. Abdelkader commence son récit : «A l?âge de 12 ans, je me suis lancé dans la pêche avec mon cousin Moh Seghir Haouès. Nous longions l?oued Isser et l?oued Sebaou. A 17 ans, dans les années 1970, j?ai rejoint Alger pour travailler dans des embarcations grecques «Navir Green Lio of Solonia» puis le «Château Papa Titane Christo». C?est comme ça que j?ai parcouru l?Algérie et le monde. J?ai travaillé partout : à Alger, Oran, Bouharoun, Béjaïa et au Cap, bien sûr». Il parlera de ses voyages en Asie, en Europe, aux Amériques. «Quelques années plus tard, j?ai été recruté à la Cnan J?y suis resté quatre ans mais je n?ai pas pu m?y adapter. Ce n?était pas fait pour moi». Abdelkader ne s?est pas contenté d?être dans la pêche et ses métiers. Il a travaillé, également, à la centrale électrique de Djanet à son ouverture entre 1980 et 1981. Il a même décroché un diplôme d?électricien en génie civil. Au moment de sa mutation au sud du pays, il a quitté la centrale pour se remettre à son métier de jeunesse, la pêche : «Je sortais de temps en temps en mer, mais j?ai fini par abandonner. Mes trois frères continuent de pêcher, d?ailleurs je m?approvisionne chez eux.» En 1981, Abdelkader rompra définitivement avec la mer, il ne sera plus lié à elle que par sa table et son restaurant qui proposent tous deux du poisson. Pour Abdelkader, «le métier de pêcheur ne fait plus vivre son homme. Il vaut mieux vivre des fruits de cette mer et cela reste insuffisant». Il s?explique : «Le poisson est trop cher et rare. Peu de gens se le permettent et encore moins les habitants de Djanet qui sont relativement pauvres.» Lui, pour joindre les deux bouts et boucler les fins de mois, il a ouvert un restaurant sur la route en face la pêcherie. Son restaurant est très peu fréquenté, car peu de gens s?arrêtent sur cette route. «Le métier de pêcheur exige un investissement lourd, il n?y a pas de garantie ni d?avantages sociaux, ni même un programme d?aide au profit des pêcheurs du Cap», a-t-il déploré. Il citera, à titre d?exemple, le cas de ses frères possédant trois barques dont une a été engloutie par la mer :« Ils n?ont jamais été remboursés.» Un gâchis L?actuelle pêcherie est un lieu de désolation, selon les habitants de ce petit bourg de Djanet. Elle est devenue un lieu de débauche où se retrouvent certains jeunes délinquants pour s?adonner à la consommation de «zetla», de barbituriques et d?alcool. Ces jeunes agressent, pour se payer leur dose de drogue, même les riverains. Selon ces mêmes riverains, les autorités, censées lutter contre ce fléau, seraient complices.