Mysticisme Qui ne connaît pas le célèbre le saint, patron de la ville d'Alger ? Son mausolée est encore aujourd'hui très visité et le nom du saint est intimement lié à celui de la capitale. En dépassant le lycée Emir-Abdelkader, on emprunte la Rampe Louni-Arezki (ex-Vallée), on tourne à gauche, on longe le trottoir qui fait face au Iycée Okba, on dépasse l'entrée supérieure du jardin Marengo, on tourne encore à gauche et on arrive à Sidi Abderrahmane. Sidi Abderrahmane, c'est le sanctuaire le plus célèbre et aussi le plus populaire d'Alger. Le personnage qui y est enterré est considéré comme le patron de la ville, moul lblad. C'est le centre du vieil Alger : centre géographique parce qu'il domine la vieille cité, mais aussi centre symbolique parce qu'on considère qu'il concentre la baraka, la bénédiction divine, rattachée au saint personnage. «Qui vient à Alger avec pureté et bonne foi pourra vivre avec du pain et un oignon !», dit l'adage populaire, «elli idjdji L?zzayer b ss?fa w nniya, i'aîch b khobza w bes's 'la». Visitant Alger au milieu du XIXe siècle, le célèbre écrivain français, Guy de Maupassant, décrit avec poésie le mausolée : «(C'est une) toute mignonne zaouïa qui s'égrène par petits bâtiments, par petits tombeaux carrés, ronds et pointus, le long d'un escalier allant en zigzag de terrasse en terrasse. L'entrée en est masquée par un mur qu?on dirait bâti en neige argentée, encadré de carrelages en faïence verte et percé d'ouvertures régulières d?où l?on voit la rade d'Alger». (Dans La vie errante) Le mausolée actuel date du début du XVIIIe siècle : sa construction a débuté en 1699, sous le dey Hadj Ahmed pour s'achever en 1730. En fait, il s'agit de l'aménagement d?un édifice plus ancien ainsi que le montre la dysharmonie entre un plan carré, apparemment plus ancien et le plan octogonal qui le surmonte. Sans doute, s'agissait-il déjà d'un ancien mausolée ou du moins de l'emplacement d'une tombe où aurait été déposée la dépouille de Sidi Abderrahmane, mort en 873 de l'hégire, 1468-69 de l'ère chrétienne. Le sanctuaire renferme un catafalque ou tabut entouré de soieries, de miroirs, d'?ufs d'autruche et de drapeaux, symboles du saint et objets de la vénération populaire. Les Français, en prenant Alger en 1830, bombardent le monument : les Algériens, fuyant l'envahisseur, s'y étaient enfermés avec leurs objets précieux. Le tabut a été ouvert par la suite mais à la place des ossements du saint on n'y a trouvé que du sable ! Sidi Abderrahmane, c'est aussi un cimetière où sont enterrés des personnages illustres comme le dey Mustapha Pacha, mort en 1825 et son fils, le dey Omar Pacha, mort en 1828 ou d?éminents professeurs tel Mohammed Bencheneb. Il y a aussi des saints, aujourd'hui encore vénérés : le wali Dadda, décédé en 1541, et Sidi Mansour, mort en 1644. Le wali Dadda, selon la tradition, est venu d'Anatolie, en Turquie, naviguant sur son tapis de prière, et tiré par des poissons. C'est lui, dit-on, qui, en 1541, a déclenché une tempête, obligeant Charles Quint à lever le siège qu'il avait mis devant Alger. La notoriété de Sidi Abderrahmane a quelque peu éclipsé celle de ces saints, mais ils bénéficient de l'aura du maître puisque leur nom n'est pas oublié ! (A suivre...)