Le lion est encore la monture ou le compagnon d'un grand nombre de saints maghrébins. Sidi Bouazza (Abû Yaz'a Yalannur), le saint du Moyen Atlas marocain, savait parler aux animaux. Il commandait aux lions et quand un visiteur qui venait le voir à Taghia en rencontrait un, il suffisait qu'il évoque le nom du saint, pour qu'il s'écarte de son chemin. En Kabylie, dans la vallée de la Soummam, sidi Yahia, qui possède son mausolée dans le village du même nom, prenait souvent l'apparence d'un lion pour se manifester. On ne manque pas de l'évoquer dans les mariages, c'est pourquoi l'un de ses surnoms est «Le lion des fêtes» (izem n tmeghriwin). Dans les premières décennies du XXe siècle, on pouvait en voir encore dans les rues d'Oran, attachés par une corde et promenés par des hommes qui se disaient adeptes de Sidi Ahmed Benaouda, l'un des saints patrons de l'Oranie. Le nom de ce saint est d'ailleurs si intimement lié au félin qu'on donnait à celui-ci le surnom de sba'a Ben'ouda, (Le lion de Ben'ouda), à moins que ce ne soit le lion qui ait donné son nom au saint, réputé être un dompteur de lions ! Un jour, pourtant, d'un coup de griffe puissant, un fauve arrache le visage d'un homme qui s'en était trop approché. Les autorités d'alors prennent prétexte de cet incident pour interdire les exhibitions de lion, à Alger puis dans les autres villes.