Chemins croisés Avant de rentrer chez elle, Dalila passe au marché pour faire des courses. Son mari, en mission à l'étranger pour un colloque, rentre le lendemain. Dalila regarde l'heure : le cours est achevé. ? Nous continuerons la semaine prochaine, dit-elle. Les étudiants, naguère occupés à prendre des notes dans un silence total, s'agitent. Des questions fusent de tous côtés, certains quittent même les gradins et se dirigent vers elle. ? Madame, vous n'avez pas abordé telle question ? Nous l'aborderons la semaine prochaine, dit-elle. ? Vous avez dit?, commence un autre étudiant. ? J'expliciterai la semaine prochaine... ? Et la première épreuve de l'année, l'EMD, elle aura lieu quand ? ? Ce sera affiché par l'administration... ? Je voudrais encore savoir... ? Maintenant, je dois partir. Elle s'arrache difficilement aux jeunes gens. Elle n?hésite pas à renvoyer ceux et celles qui veulent la suivre jusqu'au parking où elle a garé la voiture. ? J'ai à faire, la prochaine fois ! Sa voiture est là. Elle appuie sur l'alarme, tire la portière et s'engouffre dans le véhicule. Elle a vraiment à faire. Son mari, Djaâfar, également universitaire, est en mission à l'étranger pour un colloque. Absent depuis quatre jours, il rentre demain. Or, prise par son travail, elle n'a pas eu le temps de se rendre au marché et le réfrigérateur est vide. Elle ne va pas quand même lui donner à manger des pizzas ou un steak-frites ! Une collègue, Zohra, qui habite dans la même cité qu?elle, la hèle. ? Tu rentres à la maison ? ? Je passe d'abord au marché, lui dit-elle. ? A la bonne heure ! J'ai également des choses à acheter. Zohra monte dans la voiture et elle démarre. ? Alors Djaâfar rentre bientôt ?, demande Zohra. ? Demain, dit Dalila. C'est pour lui que je passe au marché. Il faut bien lui préparer quelque chose ! Un couscous ou au moins une chorba... ? Oui, dit la jeune femme, cela le changera du restaurant. Mais dis-moi, tu ne devais pas partir avec lui ? ? Oui, soupire la jeune femme, mais je n'ai pas pu obtenir mon visa à temps. Et comme son colloque allait commencer, il a dû partir. Il va en profiter pour me prendre un rendez-vous à l'hôpital. Nous partirons dès que j'aurai mon visa. Ce voyage est le voyage de la dernière chance ! ? Ne dis pas cela, dit Zohra, de l'autre côté de la Méditerranée, on fait des miracles en matière d'obstétrique. Je suis sûre que vous aurez cet enfant que vous désirez tant ! ? Espérons-le, cela fait si longtemps que nous attendons. Près de dix ans ! Nous avons fait le tour de tous les spécialistes ! ? Cette fois-ci, vous frapperez à la bonne porte. (A suivre...)