Aboli depuis 1981 et objet en 2003 d'une loi qui en renforce la répression, l'esclavage n'en demeure pas moins actuel, et continue de diviser l'opinion mauritanienne et les organisations de droits l'Homme. Suivant la version officielle, l'esclavage n'est plus qu'un «mauvais souvenir» en Mauritanie et il n'en subsiste que «les conséquences socio-économiques que des programmes de promotion ciblés en cours seront suffisants pour éradiquer», afin d'aboutir à une «mise à niveau» des anciens esclaves avec leurs anciens maîtres. Néanmoins, sur le terrain, la réalité est tout autre selon Abdul Aziz Niang, vice-président de SOS-Esclaves. Pour lui, «les pratiques esclavagistes sont monnaie courante». Il affirme que son organisation, qui court toujours derrière sa reconnaissance officielle par le gouvernement, «vient de libérer un esclave, M. Matalla, qui était berger au service de maîtres, dans l'extrême nord du pays». «Faux», rétorque Ahmed Ould Lefdal, conseiller au sein du parti au pouvoir, «l'esclavage n'est plus qu'un de ces thèmes que quelques activistes en perte de vitesse brandissent pour tenter de se faire une santé politique». M. Lefdal estime que «cette version est manifestement une falsification des faits» par des gens pour qui ce thème «constitue un fonds de commerce fort rentable, brassant là-dessus des montants non négligeables». Pour les observateurs, des avancées importantes sont faites tant du fait du combat permanent que livrent les hommes politiques de l'opposition et les ONG en faveur des anciens esclaves, que des actions menées par le gouvernement dans cette direction. Il n'en demeure pas moins qu'un travail en profondeur reste à faire pour donner un coup d'accélérateur à la promotion socioéconomique de cette «importante frange» de la population qui se recrute dans toutes les communautés nationales (négro-africaine mais aussi arabe) face notamment aux dogmes et aux castes qui en freinent l'élan.