Maux Criminalité, drogue, épidémies? ce quartier est un terreau favorable à toutes les calamités. Sidi El Bachir, ni bidonville ni cité dortoir. Cette bourgade à 5 km d?Oran est pourtant construite et occupée d?une manière archaïque, qui défie le progrès social et la fait vivre dans un espace-temps anachronique. Chaque microcosme familial se comporte comme en milieu rural, avec toutefois la télévision, la radio et la parabole pour les plus chanceux. Sidi El Bachir, une agglomération de 60 000 habitants a un cachet sauvage et quelque peu exotique. La bourgade n?était déjà habitée que par des familles modestes ou très pauvres fuyant le terrorisme. Depuis la crise économique et sécuritaire, la «ghettoïsation» et le retour à des valeurs refuges ont entraîné le quartier dans un isolement aggravé par le dysfonctionnement des transports publics vers le centre d?Oran, pourtant très proche, les habitants de cette cité survivent avec les moyens du bord. Le phénomène «rural» est présent partout, dans la topographie des lieux et dans le vécu parfois sordide de ces Algériens «de l?Algérie très profonde» et pourtant oubliée. L?arrivée en force des masses rurales à la recherche de travail et la démographie galopante ont favorisé deux phénomènes : l?autoconstruction anarchique et un espace vital surpeuplé. Trois écoles primaires et deux CEM existent dans cette bourgade, mais pas de lycée. Quant aux magasins, ils sont installés dans n?importe quelle structure, ils réalisent de gros bénéfices sur le dos des habitants, loin de tout contrôle. Les marchands ambulants grimpent régulièrement avec leurs carrioles jusqu?aux portes des maisons, apportant légumes, fruits et poissons à moindre frais. On serait tenté de dire qu?après tout, les «résidents» de ce quartier connaissent les mêmes difficultés que la plupart des citoyens algériens vivant à la périphérie des villes?, avec la différence, toutefois, de la diversité impressionnante des menaces qui pèsent sur les familles de cette «cité» : délinquance, atrophie intellectuelle et régression, drogue et malvie. Dans le cas d?implantation urbaine anarchique, la greffe est déjà difficile à réaliser. Le chômage du père de famille ou l?inactivité des fils oblige les mères et les s?urs à travailler et les petits, qui seraient mieux sur un terrain de foot, sont obligés de parcourir 5 ou 6 km à pied pour vendre en ville des bourses à 2 DA. L?exclusion et la cherté des articles et autres manuels scolaires marginalisent chaque année un trop grand nombre d?enfants. Les parents avouent d?ailleurs qu?ils «préfèrent les voir gagner leur vie, plutôt que de compter sur eux pour les prendre totalement en charge». La force publique a fort à faire dans ces quartiers chauds pour faire face aux conséquences de la démission parentale. L?imposant bourg de Sidi El-Bachir ne possède ni marché ni bureau de poste. Il faut donc «descendre» à Oran pour communiquer avec les autres. Dans ce quartier, il n?existe même pas de bennes à ordures et les habitants alertent sans arrêt les autorités locales sur l?état des routes. Non goudronnées, elles causent de gros dégâts en temps de pluie et rendent toute circulation impossible. Ces conditions de vie difficiles génèrent des maladies, infantiles surtout.