Projection Le film présente de nombreux anachronismes, en cela il perd de sa crédibilité et de son authenticité La salle El-Mougar a abrité, jeudi, en avant-première, la projection du Soleil assassiné, un film réalisé par Abdelkrim Bahloul. Cette projection entre dans le cadre d?un hommage consacré à Jean Sénac, poète regorgeant de soleil et imbibé d?embruns de la Méditerranée. L?histoire raconte une rencontre de Jean Sénac avec des jeunes adeptes du théâtre et de la poésie. Tous vont assister au combat que Jean Sénac menait pour la jeunesse algérienne. Le film est fort dans la mesure où il y a de l?émotion et énormément de vérités au moment où il dénonce les pratiques du gouvernement en place contre une jeunesse qui ne cessait d?espérer, d?ambitionner et de rêver, tentant de la freiner et de l?étouffer dans sa quête de liberté. Le Soleil assassiné est un film qui retrace cependant en quelques scènes le parcours de Jean Sénac ainsi que son combat. Par ailleurs, le personnage de Jean Sénac est réduit uniquement à sa différence sexuelle, occultant sa poésie et le combat du poète : le réalisateur a mis l?accent sur son homosexualité, donnant la nette impression que le poète était persécuté et assassiné pour avoir été un homosexuel, alors que la véritable raison de son exclusion puis de son assassinat était le fait qu?il disait une poésie engagée, et que le poète, lui-même était engagé sur le front : il luttait contre l?arbitraire et l?autorité rétrograde, et militait pour la liberté et le droit d?exister. Ce qui comptait pour lui, c?était une Algérie plurielle, c?est-à-dire une Algérie avec ses différentes variantes culturelles et ses composantes linguistiques multiples. Il combattait pour une Algérie jeune, dynamique et fière. Le film reste inachevé, incorrect et maladroit. Il présente des anomalies dans la mesure où l?on peut relever des anachronismes, c?est ainsi qu?on entend dans le film cheb Mami qui chante, alors que l?histoire se passe fin 1960 et début 1970. Par ailleurs, l?un des personnages parle tunisien lorsqu?il s?adresse à son petit frère, et les autres, qui parlent entre eux en français, ont un accent beur et à la fin du film, le réalisateur nous montre un grand bateau quittant le port d?Alger et sur lequel est inscrit en gros caractères : «Tareq Ibn Zayad», le nom du ferry. Le réalisateur, Abdelkrim Bahloul, présente le personnage autrement : le rôle de Jean Sénac a été tenu par Charles Berling ; celui-ci dans le film avait une chevelure bien fournie et ne portait pas de barbe, contrairement à Jean Sénac qui, lui, avait une calvitie et une barbe touffue. En dépit de sa charge émotionnelle, le film a un goût d?incorrect, parce que le réalisateur n?a pas tenu compte des détails qui auraient pu donner à son ?uvre plus de crédibilité et d?authenticité.