Rencontre «La langue n?est utile que si elle est ouverte à d?autres langues, que si elle s?enrichit et évolue d?une manière continue», dit Marie Treps. Il n?y a pas d?endroit plus approprié pour parler des mots que le Salon du livre, puisque celui-ci représente par excellence un lieu où le livre est souverain. Le livre est un contenant où l?on trouve, d?une page à l?autre, une multitude de mots et d?écritures ; chacun renvoie à une pensée, se réfère à un souvenir, évoque des émotions et des situations. Lors de ce salon, une rencontre a eu lieu autour des mots et des écritures, animée par Marie Treps, linguiste et anthropologue qui a édité un livre sur les mots et leur véhicule dans une langue comme dans une autre. C?est à partir de son livre Les Mots voyageurs que Marie Treps nous raconte les mots étrangers qui sont devenus, au fil du temps, partie intégrante de la langue française. C?est-à-dire qui sont devenus français. L?on peut ainsi lire sur la quatrième couverture du livre : «(?) Ces milliers de mots débarqués dans notre langue, mâchés de bouche en bouche, nous les avons faits nôtres?» «Parler une langue, c?est parler plusieurs langues, c?est être polyglotte sans s?en rendre compte, et il suffit de passer d?une situation à une autre pour parler une autre langue», dit-elle, ajoutant : «Les mots nous font voyager dans divers mondes. Dès qu?on commence à penser, à parler, des mots arabes, anglais, italiens, allemands, espagnols, portugais, amérindiens et d?autres mots d?autres nationalités nous viennent aux lèvres, tout en ignorant qu?ils sont étrangers à notre langue maternelle.» Dans son livre Les Mots voyageurs, qui représente un travail de recherche, l?écrivain nous montre de quelle manière une langue se met en contact avec une autre, et comment elle s?enrichit en s?assimilant à la langue d?autrui. C?est un livre amusant dans la mesure où il nous raconte les mots, leur origine, mais il est aussi didactique, à partir du moment où il nous enseigne l?ouverture d?esprit à d?autres sociétés et à d?autres cultures, et ce par le biais des langues. «Il faut adapter l?inconnu au connu», souligne Marie Treps, ajoutant : «Ces mots d?autres langues peuvent nous ouvrir des horizons et aiguiser notre curiosité.» Cela permet d?avoir une meilleure connaissance de l?autre mais à la fois de soi ; le métissage des langues favorise le foisonnement du vocabulaire, donc l?enrichissement d?une langue. En incorporant les mots d?autrui dans la langue maternelle, en les adaptant à nos besoins langagiers, c?est d?emblée l?invention d?un autre vocabulaire : des mots nouveaux naissent, se créent et donnent lieu à une mosaïque de mots et à une culture pluridimensionnelle. «Les mots étrangers font leur chemin dans la langue de l?autre et ce contact favorise le mélange de mots, donc de la culture», dit-elle. Effectivement, «derrière les mots, il y a les gens, les cultures, les histoires», explique-t-elle, ajoutant : «Les mots voyagent avec les gens et en contact avec les étrangers, on s?empare de leur linguistique qu?on fait sienne.» Les Mots voyageurs, ce livre à la fois amusant et pédagogique, invite le lecteur à s?ouvrir aux autres registres linguistiques, à ne pas être puriste rétrograde ; il faut assimiler l?autre à soi pour s?enrichir et évoluer sur le plan culturel, intellectuel. Pour conclure, Marie Treps dit : «La langue n?est utile que si elle est ouverte à d?autres langues, que si elle s?enrichit et évolue d?une manière continue.»