Diversité n Si Anouar Benmalek s'emploie à écrire, d'un livre à l'autre, sur le monde, c'est afin de mettre en scène les drames humains. Anouar Benmalek est considéré comme l'un des noms représentatifs de la littérature algérienne d'expression française. Il est d'ailleurs qualifié par la presse française de «Faulkner méditerranéen», tout comme il est comparé à Camus par la prestigieuse revue américaine Harvard Review. Celui dont le nom a parfois été cité dans la liste des écrivains nobélisables, tient, lors d'une rencontre à l'Institut culturel français, à expliquer qu'«écrire, c'est un peu lutter et dépasser la mort en revanche, quand on ne peut contrôler sa vie». Pour lui, écrire c'est dépasser les préjugés, transcender les frontières. Il se considère d'ailleurs comme «un auteur transfrontalier, qui ne croit pas trop à la sédentarité romanesque». «Pourquoi m'imposerai-je des frontières ?», déclare celui qui possède une plume élégante, mais critique, quelques fois violente. Et de reprendre : «A mon avis, l'écrivain n'a pas à se limiter dans sa quête littéraire». Autrement dit, Anouar Benmalek se veut et se place comme «un homme de lettres ouvert sur le monde». «Toute la planète m'appartient», dit-il. Et de renchérir : «L'Algérie n'est pas mon seul horizon même si elle m'est si chère.» Cela transparaît dans ses romans, où les lieux géographiques sont multiples et lointains. C'est ainsi qu'il parle des peuples africains (Fils de Shéol), des aborigènes d'Australie (L'enfant du peuple ancien), des Andalous (Ô Maria)… «Même si l'Algérie est chère à mon cœur, elle n'est pas mon seul horizon», soutient-il. C'est ainsi que le romancier «brandit sa multiplicité littéraire tel un étendard» en vue de donner un nouveau souffle à la littérature en proposant un «œil neuf», «extérieur», d'un écrivain algérien sur les tragédies qui secouent l'humanité. En d'autres termes, Anouar Benmalek estime «ne pas être algérien» quand il écrit, mais plutôt «un écrivain dans le monde» à qui appartient donc «le droit d'écrire sur l'Autre».Cette appartenance au monde, il l'assume sans complexe, cette multiplicité géographique, il en fait des lieux de création. Cette liberté d'être citoyen du monde, il la revendique constamment. «On ne doit pas censurer notre imagination», estime-t-il, et de poursuivre en y insistant : «Il faut résister à cette dictature éditoriale si elle est imposée à un auteur. Le roman dépoussière et nous fait découvrir ce fond qui nous est commun à tous.» Si Anouar Benmalek s'emploie à écrire, d'un livre à l'autre, sur le monde, c'est afin de mettre en scène les drames humains, c'est pour protester, dénoncer et s'enrager devant les massacres, voire les génocides dont sont victimes les peuples les plus démunis et les plus vulnérables. «Le vrai thème du livre, c'est l'oubli. Le livre n'existe que parce qu'il y a cet oubli épouvantable», explique-t-il, et d'insister : «Nous devons écrire car les victimes, elles, le font très peu. En Afrique, je crois, il y a un déficit de mémoire. Je regrette que les Africains n'écrivent pas plus sur leur continent. Comme si nous trouvions parfois qu'à nos yeux nous ne valons pas la peine qu'on se souvienne de nous.»