Course n Treize candidats affronteront le chef de l'Etat tchadien, Idriss Déby, au pouvoir depuis 26 ans, sans grandes chances de l'emporter. Quatre d'entre eux, bien implantés régionalement, ont cependant l'occasion de tester leur influence auprès de la population. Saleh Kebzaboh, candidat de l'Union nationale pour le développement et le renouveau (UNDR), âgé de 69 ans, est originaire de la province de Mayo Kebbi (sud-ouest), la région la plus peuplée de ce pays très pauvre. De confession musulmane, ce journaliste de formation entre en politique après la conférence nationale souveraine de 1993. Fort d'une dizaine de députés à l'Assemblée nationale, il est considéré comme le chef de file de l'opposition tout en ayant occupé plusieurs postes ministériels. Déjà candidat à la magistrature suprême en mai 1996, il termine troisième au premier tour avec 8,6%, avant d'appeler ses électeurs à voter pour Idriss Déby Itno au second tour. Ce ralliement lui vaut le portefeuille de ministre d'Etat à l'Agriculture, qui en a fait le deuxième personnage du gouvernement. Il boycottera les présidentielles suivantes. Son actuelle campagne électorale se distingue par un ton critique, voire violent, envers le régime du président Déby. L'ancien Premier ministre Joseph Djimrangar Dadnadji, candidat du Cadre d'action populaire pour la solidarité et l'unité de la république (CAPSUR), âgé de 62 ans, est un administrateur civil de formation. De confession chrétienne, il est originaire de Mandoul, dans le sud du Tchad. Plusieurs fois ministre et proche collaborateur de Déby, il a été Premier ministre de 2013 à 2014. Membre du parti au pouvoir pendant plus de 20 ans, il connait bien les rouages du système. Après avoir démissionné avec fracas et créé son parti en juillet 2015, il propose «la lutte contre la patrimonialité du pouvoir». Mahamat Ahamat Al Habo, âgé de 62 ans, est natif d'Abéché, dans l'est du Tchad. Docteur en mathématiques, il est le candidat du Parti pour les libertés et la Démocratie (PLD) dont il est le fondateur avec Ibni Oumar Hamat Saleh, enlevé par l'armée en février 2008 à son domicile et depuis considéré comme mort. Plusieurs fois ministre sous le régime de Déby, il a été également ambassadeur en France. Il est susceptible de gagner des voix dans l'est du pays aux dépens du chef de l'Etat. Enfin, Laokein Kourayo Medar, 63 ans, est originaire de la région du Logone occidental, dans le sud. Il est le candidat de la Convention tchadienne pour la paix et le développement (CTPD). Agroforestier de formation, il a été élu maire de Moundou, deuxième ville du pays et capitale économique, en 2012. Il a été deux fois ministre, puis directeur général adjoint de la société cotonnière du Tchad dont le siège est basé à Moundou. S'il est élu, il entend «renforcer l'unité nationale, promouvoir l'emploi et l'autosuffisance de la jeunesse, les droits de l'Homme, la liberté d'expression et l'indépendance de la magistrature». Bien implanté dans les régions du Logone occidental et oriental, il est susceptible d'y arriver en tête au premier tour. Un guerrier en politique Arrivé au pouvoir à N'Djamena par les armes en 1990, Idriss Déby Itno, candidat à un cinquième mandat présidentiel, reste un guerrier dans l'âme, ennemi implacable des groupes jihadistes en Afrique mais sans être parvenu à sortir de l'extrême pauvreté la majorité de la population tchadienne. Portant indifféremment le boubou, le costume trois pièces ou le treillis, le regard souvent masqué par des lunettes teintées aux fines montures, celui qui assure la présidence en exercice de l'Union africaine (UA) a acquis ces dernières années une stature de premier plan sur le continent grâce à sa redoutable armée. Et début 2015, l'armée tchadienne a lancé une vaste offensive au Cameroun, au Nigeria et au Niger contre les islamistes armées de Boko Haram, sur ordre d'Idriss Déby qui qualifie le groupe ayant rallié l'organisation de l'Etat islamique (EI) de «horde d'illuminés et de drogués». Cette détestation de longue date des jihadistes est d'ailleurs un trait de caractère du président tchadien, musulman dans un pays où les chrétiens forment plus d'un tiers de la population. Un pays pauvre malgré la manne pétrolière Le Tchad, qui assure la présidence en exercice de l'Union africaine (UA), est un des pays les plus pauvres du monde malgré le pétrole, première source de recettes dont l'exploitation des gisements a commencé en 2003. Les revenus pétroliers ont permis au Tchad de moderniser son armée et de se doter d'un meilleur réseau routier. Mais la société civile et l'opposition demandent une meilleure utilisation de la manne pétrolière envers la population. La production de coton et l'élevage représentent également des importantes sources de revenus. Le RNB (revenu national brut) par habitant s'élevait à 980 dollars en 2014, selon la Banque mondiale. Enclavé au cœur du Sahel, le pays est constitué d'une zone sahélienne au Sud et d'une immense partie désertique au Nord. Le Tchad a des frontières avec 6 pays: Cameroun, Nigeria, Niger, Libye, Soudan et Centrafique. Sa population s'élevait à 13,59 millions d'habitants en 2014, selon la Banque mondiale. 53% sont musulmans, 35% chrétiens, le reste étant animistes. Surfant sur une promesse «d'émergence» dans un pays où, malgré les ressources pétrolières et les engagements pris envers les bailleurs de fonds d'améliorer santé et éducation, la moitié de la population survit en dessous du seuil de pauvreté et 70 % est analphabète.