scène n Deuxième ville et capitale économique de la Syrie, située à l'extrémité nord-ouest du pays, Alep est aujourd'hui le principal champ de bataille, où s'affrontent presque tous les acteurs de la crise syrienne. Les combats font rage sur plusieurs fronts : armée et milices loyalistes syriennes, Daech, Al-Nosra, ainsi que les autres groupes djihadistes, ASL (Armée syrienne libre) et les Kurdes. Epaulées par des frappes aériennes russes et des combattants iraniens et libanais au sol, les forces loyalistes syriennes ont pu regagner de larges portions de territoire à l'intérieur et autour de la ville dont ils contrôlent désormais environ 60%. La bataille actuelle d'Alep marque ainsi un tournant décisif dans le conflit syrien, en renversant progressivement l'équilibre des forces militaires dans cette grande ville en faveur du gouvernement légitime. Parmi les importantes percées de l'armée à Alep : parvenir à couper la route Alep-Bab Al-Salam, qui mène à la frontière turque, la principale voie de ravitaillement des djihadistes, notamment du Front Al-Nosra et d'Ahrar Al-Cham, et briser le siège de Nubul et Zahraa, deux villes sous contrôle des forces terroristes depuis trois ans. Les combats de l'armée syrienne se concentrent aujourd'hui dans le quartier de Cheikh Maqsoud, au nord de la ville d'Alep, qui est d'une importance stratégique, car c'est par là que passe l'autoroute Castello, considérée comme le dernier axe de ravitaillement permettant de rejoindre la Turquie et la région d'Edlib depuis Alep. L'armée syrienne pourrait conserver son avancée militaire dans la ville et sa portion la plus large pour deux causes principales : d'un côté, les forces gouvernementales sont une seule entité cohérente face à une mosaïque de groupes armés, qui sont de plus en plus divisés entre eux et entrent souvent en conflit. De l'autre côté, les lignes d'approvisionnement pour ces groupes, que ce soit en provenance d'Iraq ou de la frontière turque, sont de plus en plus contrôlées par Damas. Le président syrien, Bachar al-Assad, a d'ailleurs encore insisté récemment sur la nécessité de restituer la souveraineté de la totalité d'Alep, preuve que reprendre toute la ville est en fait un enjeu stratégique majeur. En effet, en cas de victoire, le gouvernement syrien pourrait renforcer son contrôle sur une grande partie de «la Syrie utile», concept élaboré par Bachar et qui désigne particulièrement la ligne sud/nord, qui s'étend de Damas à Alep, sachant que les forces loyalistes contrôlent déjà les grands centres urbains de Damas, de Homs et de Hama. Par ailleurs, la chute d'Alep serait également une grande défaite pour les groupes terroristes, téléguidés par Washington et Tel-Aviv, et soutenus directement par Riyad et Ankara. En effet, la victoire du régime légitime syrien dans cette bataille stratégique serait une grande défaite pour la Turquie, puisqu'Alep est à la fois le point d'entrée principal de ravitaillement turc pour les factions auxquelles elle apporte son soutien ainsi que le point faible par lequel ces factions peuvent cibler la zone extrêmement fortifiée du régime légitime syrien, notamment à Lattaquié. C'est pour cette raison qu'Ankara, dès le début de la bataille d'Alep a souhaité intervenir directement sur le terrain, ambition se heurtant à un ferme refus américano-russe.