Le château de cartes djihadiste semble en voie de désintégration sur plusieurs points du territoire syrien. Pas une heure ne passe sans que l'on n'apprenne la prise d'une nouvelle ville ou d'un carrefour stratégique. Dans le nord, dans le sud, à l'ouest... partout les positions rebelles s'écroulent. A Deraâ, les troupes loyalistes lancent une grande offensive après avoir pris Al Naymah. Dans la banlieue de Damas, Darayya, point stratégique de la Ghouta tenu par Al Nosra, est totalement encerclé. Au nord d'Homs, les avions russes ont pilonné durant 36 heures consécutives les défenses islamistes afin d'ouvrir la voie à l'armée syrienne. A Deir ez-Zoor, le bataillon qui résiste assez héroïquement à Daech depuis deux ans s'est même permis une petite attaque et a pris un tunnel et une cache d'armes aux hommes en noir. Mais c'est surtout dans le nord, autour d'Alep, que les terroristes modérés prennent une monumentale fessée : villes et villages tombent littéralement les uns après les autres. La situation change d'heure en heure, et il serait trop long de détailler les avancées de l'armée syrienne, du Hezbollah ou des milices chiites. Les combats sont meurtriers et les djihadistes se défendent avec l'énergie du désespoir, mais le sort d'Alep est scellé. La ville qui devait devenir la capitale de la rébellion islamiste alimentée par la Turquie voisine est désormais coupée de tout. Si hier encore, les parrains saoudiens et turcs pouvaient éventuellement nourrir l'espoir de voir rouvrir l'autoroute qui mène aux armes ottomanes, ils ont été froidement douchés : Hezbollah et armée syrienne ont définitivement barré le passage. Grosse cerise sur le gâteau, les Kurdes ont également commencé à bouger ! Profitant des victoires du régime, les YPG d'Afrin ont repris, avec l'appui de l'aviation russe, quelques villages à Al Nosra et Ahrar al-Cham, scellant encore un peu plus le sort d'Alep. Il semble que les YPG ne vont pas s'arrêter là... Nous sommes vraisemblablement au début du mouvement de jonction entre Afrin et Kobané, réunissant en une longue bande de terre tous les Kurdes syriens, coupant définitivement par la même occasion les communications entre Daech et son parrain turc. On imagine les nuits sans sommeil du sultan en son vaste palais d'Ankara... L'intervention russe a pulvérisé ses plans syriens : ses petits protégés terroristes sont coupés de maman Turquie tandis que son cauchemar se réalise avec la constitution d'un Kurdistan autonome syrien à la frontière turque, contrôlé par ses ennemis du PYD et arrière-base du mouvement insurrectionnel du PKK dans le Kurdistan turc. Le boomerang est revenu en pleine poire, «le sultan» est châtié par là où il a péché. Est-il assez fou pour intervenir militairement ? Sans doute pas... Damas peut plastronner, par la voix de son ministre des Affaires étrangères : «Que personne ne songe à envahir la Syrie car nous renverrons les agresseurs chez eux dans des cercueils en bois.» Il sait bien que la Turquie n'osera pas risquer d'ajouter l'humiliation militaire aux revers diplomatiques et stratégiques. Et Poutine d'enfoncer le clou où ça fait mal. Les Kurdes syriens ouvriront prochainement une représentation diplomatique à Moscou ! Une nouvelle baffe pour Erdogan. Ah sultan, tu vas longtemps regretter ton immense bourde du 24 novembre...