Le marché, el-souk, est un endroit très fréquenté. Si aujourd?hui, c'est avant tout un lieu où on commerce, c'était, il y a encore quelques décennies, un point de rencontre. En l'absence de la presse et de la télévision, on y colportait les nouvelles, on se racontait les histoires de la ville ou du quartier, les drames comme les faits divers. Aujourd?hui encore, beaucoup de gens se rencontrent au souk et prennent du plaisir à bavarder. Cette spécificité a fait qu?en français comme dans les autres langues européennes, on a gardé, pour parler du marché algérien et maghrébin en général, le mot arabe souk. Le même mot est employé depuis longtemps en berbère. Il y a trois types de souks : le souk aux fruits et légumes qui est quotidien et correspond au marché moderne, le souk aux bestiaux et à la viande et le souk aux vêtements et aux objets divers qui sont hebdomadaires. Ce sont ces deux derniers qui attirent le plus de monde. Ce qui fait le souk, c'est avant tout la foule : vendeurs, acheteurs ou simples curieux déambulant à la recherche de la bonne affaire, et qui viennent par centaines. Les langues algériennes emploient le mot pour décrire une situation confuse, faite de bruit et de bousculade : wallah ghir souk (par Dieu, c'est un souk) dit-on d'une maison où on entre et on sort comme on veut ; maççi souk (ce n'est pas un souk) dit-on à ceux qui entrent sans frapper ou se croient tout permis dans un lieu donné. Les transactions difficiles, les marchandages qui n'en finissent pas sont également assimilés au souk : ma rak-ch f souk (tu n'es pas au souk) dit le commerçant au client qui veut négocier un prix fixe. Il est vrai qu'au souk, les prix ne sont jamais fixes et qu'on peut toujours les discuter. Le client qui réussit à faire baisser de moitié le prix d'un objet est très content et croit avoir «roulé» le marchand ; il ne sait pas que souvent, pour ne pas dire toujours, le marchand affiche des prix élevés pour pouvoir les baisser ensuite. Cette pratique est encore aujourd'hui très courante !